Bonjour, chers lecteurs et chères lectrices !
J'ai sous les yeux un dossier spécial "littérature féminine" dans le dernier numéro du magazine Lire. Et je m'y suis intéressée de près, étant une femme, et une romancière en herbe (enfin, en herbe, je ne sais pas trop ce que ça veut dire... Depuis des années que je suis en herbe, je m'interroge : à partir de quand acquiert-on le statut de plante, ou d'arbuste ?). Bref. Régulièrement, je me demande si je devrais postuler à l'amicale des écrivains ou des écrivaines, et chaque fois je me réponds que ce qui compte c'est d'être exigeant, de continuer à forer son petit bout de terre personnel à la recherche de l'eau, et peu importe qu'on soit un homme, une femme, ou un savant mélange des deux. C'est vrai, ce qui compte, c'est le talent. Et en la matière, hommes et femmes se mesurent à armes égales lorsque dans leur écriture ils atteignent à l'universel.
Cependant... dans le magazine Lire, je découvre avec stupéfaction qu'en France, de nos jours, "les femmes sont cinq fois moins éditées que les hommes"... Cinq fois moins ??.... Aussitôt je me dis que je suis mal barrée, étant une femme encore non éditée ! Apparemment, la statistique n'est pas en ma faveur... Devrais-je publier sous un pseudonyme masculin, pour avoir mes chances ? C'est toujours un choc, quand on pense habiter un monde à peu près évolué, de débusquer une discrimination jusque dans les milieux où la pensée se prétend libre de préjugés. On se prend dans la figure, sans y être préparée, les scories d'une pensée réactionnaire qui a décidément la peau dure, pour arriver à se maintenir après que tant de femmes écrivains ont prouvé leur valeur, en braves petites soldates, souvent au prix de leur vie personnelle, si ce n'est de leur vie tout court.
J'ai donc décidé de me pencher plus sérieusement sur la question... Ma conclusion reste la même, et je vous la livre en introduction, afin que ceux qui n'ont aucune patience puissent en retirer d'un coup tout le sel : ce qui compte, c'est la valeur d'un écrivain, et le talent n'est pas sexué. Il est bien davantage un dépassement de soi dans l'autre, il s'affranchit des limites du sexe, de la couleur de peau, des opinions politiques, des barrières sociales. Un bon romancier, ou une romancière talentueuse, investissent profondément tous leurs personnages, qu'ils soient hommes, femmes, enfants ou crapauds.
Je n'ai pas changé d'avis. J'ai juste étoffé ma réflexion. Je crois que ce qui distingue dans l'histoire une "écriture féminine", une "écriture noire" ou une "écriture gay", par exemple, c'est le regard de la société qui a toujours stigmatisé ce qui mettait en péril l'ordre établi. Or, l'écriture, c'est un concentré de désordre ; parce qu'on écrit toujours avec cette partie de soi dont les contours nous échappent, comme ces "terres inconnues" des cartes anciennes. C'est pourquoi on peut avoir du mal à assumer ce qu'on a écrit. C'est nous, et ce n'est pas nous. C'est nous, pour le meilleur et pour le pire. C'est un soi élargi aux dimensions de l'humanité, qui va de la bête à l'être humain le plus abouti. C'est tout le mystère et toute la beauté de la chose. Il en résulte du même coup qu'on ne sait pas ce qu'on a écrit. Seuls les autres peuvent nous le dire.
Et les "autres" ne se privaient pas, dans les siècles passés, de dire aux femmes ce qu'elles avaient écrit... Je pourrais vous présenter ici toute une collection d'insultes courtoises, de venenum in cauda, de propos condescendants adressés à des femmes qui s'étaient risquées sur le terrain de l'écriture, mais je me contenterai d'un seul exemple. J'ai grandi avec Jane Eyre comme livre de chevet, bien avant de savoir qui était cette Charlotte Brontë qui l'avait écrit, et tenant pour acquis que les femmes écrivaient aussi facilement que les hommes, puisque j'en avais la preuve entre les mains.
Ce n'est que bien plus tard que j'ai découvert que la vocation d'écrivain avait été, pour Charlotte Brontë et pour ses sœurs, un cadeau empoisonné. Les extraits ci-dessous et les détails biographiques sont tirés du Charlotte Brontë d' Elisabeth Gaskell, qui est intéressant à plus d'un titre : d'abord parce qu' Elisabeth Gaskell est une contemporaine de Charlotte Brontë, bien placée donc pour connaître les déchirements qui naissaient alors de l'impossible conciliation, dans une seule personne, d'une femme "convenable" et d'un écrivain. Ensuite parce que cette biographie a été écrite pour défendre Charlotte Brontë, après sa mort précoce, des accusations d'immoralité dont ses livres, et par conséquent sa personne, étaient l'objet.
Pour ceux qui n'auraient jamais entendu parler du presbytère de Haworth et de ses occupants, voici un petit résumé : Le 25 février 1820, un pasteur anglican, le révérend Patrick Brontë, d'origine irlandaise, venait s'installer à Haworth, dans cette partie très sauvage du nord-est de l'Angleterre où les landes couvertes de bruyère sont, à perte de vue, l'unique végétation qui survit à l'âpreté du climat. Arrivant dans ces lieux, Patrick Brontë ne pouvait deviner qu'en trente-cinq ans, il y enterrerait ses six enfants et sa femme... L'isolement, la dureté de la vie, la pauvreté, les miasmes du cimetière surpeuplé sur lequel donnait le presbytère, l'attraction de ce paysage indompté des "moors"(c'est le nom qu'on donne aux landes), une indépendance innée, la mort précoce de leur mère et une certaine liberté de pensée que leur père avait laissé pousser chez ses enfants, tout cela fabriqua, sans en être l'explication suffisante, une famille de surdoués qui a laissé des traces incandescentes dans la littérature. Les deux aînées étant mortes à l'âge tendre, restaient un garçon, Branwell, et trois filles : Charlotte, Emily et Anne. A l'écart de toute vie sociale, hormis la fréquentation de leur père et d'une vieille gouvernante qui leur racontait des histoires effrayantes au coin du feu, ils avaient poussé comme des esprits libres qui seraient trompés d'époque. Car le XIXème siècle était un siècle de paradoxes où les poussées libertaires rencontraient plus que jamais la tentation d'écraser le feu sous la cendre. Les femmes en furent, avec les pauvres et d'autres minorités incontrôlables, les premières victimes.
La famille Brontë était une pépinière d'artistes nés, mais Branwell n'avait pas d'argent pour développer son talent, et ses sœurs luttèrent longtemps contre leur vocation artistique, parce que même à Haworth, tout le monde savait qu'une femme écrivain était aussi peu fréquentable qu'une comédienne ou une danseuse... Finalement, après s'être escrimées pendant des années à être gouvernantes ou professeurs, au moment précis où leur santé commençait à s'altérer sérieusement, les trois sœurs cédèrent à leur exigence intime, et écrivirent chacune au moins un roman, qu'elles envoyèrent à des éditeurs, en prenant des pseudonymes. Et voici comment, des années plus tard, alors que ses sœurs étaient depuis longtemps dans leur tombe, Charlotte expliquait ce choix :
" Peu désireuses d'être personnellement connues du public, nous voilâmes nos vrais noms sous ceux de Currer, d'Ellis et d'Acton Bell ; ce choix ambigu était dicté par une sorte de scrupule de conscience à l'idée d'adopter des noms indiscutablement masculins, tout en ne souhaitant pas nous dire femmes parce que — nous ne nous doutions pas à l'époque que notre façon d'écrire et de penser n'était pas de celles qu'on juge "féminines" — nous avions vaguement l'impression qu'une certaine prévention s'attache aux femmes écrivains ; nous avions remarqué que les critiques utilisent parfois pour les châtier l'arme de la personnalité et, pour les récompenser, une flatterie qui n'est pas une louange authentique."
On voit que Charlotte Brontë n'était pas tombée de la dernière pluie ! Malgré toutes ces précautions, les critiques concernant leurs romans, et le jugement qui les accompagnait tel un couperet — en cette époque où la morale se glissait jusque dans l'étude des physionomies ! — les atteignirent de plein fouet. Les hauts de Hurlevent, la Locataire de wildfell Hall et Jane Eyre furent taxés de vulgarité et d'immoralité, avec d'autant plus de virulence que dans le même temps des voix s'élevaient déjà pour saluer leur singularité, leur force littéraire. Le suspense tenaillait l'Angleterre : qui se cachait derrière les frères Bell ? Etait-ce une seule et même personne ? Etait-ce une femme dénaturée, une créature fascinante et répulsive qui se terrait à Londres ? Le mystère fut longtemps préservé, mais malgré ça le soupçon planait, et Currer Bell, alias Charlotte Brontë, recevait de ses "admirateurs" des lettres ambiguës, où on lui faisait la leçon tout en prétendant la complimenter, et où on lui conseillait de tenir la bride serrée, à l'avenir, à son imaginaire trop audacieux.
A ces conseils paternalistes, Charlotte répondait ceci :
" Quand un écrivain écrit le mieux, ou du moins avec le plus de fluidité, une influence semble s'éveiller en lui et devenir son maître qui ne fera que ce qu'il veut, ne présentant que les images qui lui siéent, dictant certains mots et insistant sur leur usage aussi véhéments et mesurés soient-ils, créant de nouveaux personnages, donnant aux événements des issues inattendues, rejetant les idées les mieux élaborées, en créant et en adoptant de nouvelles.
N'en est-il point ainsi ? Et devons-nous essayer de combattre cette influence ? Pouvons-nous vraiment la combattre ?"
En 1848, de son Yorkshire profond, Charlotte Brontë décrivait à merveille, quelques décennies avant la psychanalyse, l'inconscient au travail dans l'écriture... On n'écrit pas ce qu'on veut, on écrit avec ce qui nous échappe.
Un peu plus tard, relisant les Hauts de Hurlevent après la mort d'Emily, elle écrira ceci :
" Je m'oblige à relire le livre, que j'ouvre pour la première fois depuis la mort de ma sœur. La puissance de son écriture me remplit d'une nouvelle admiration et pourtant elle m'oppresse : le lecteur n'a jamais le loisir de goûter un plaisir sans mélange, chaque rayon de soleil se faufile à travers des nuées de nuages noirs, chaque page est pleine d'une sorte d'électricité, et l'auteur n'avait pas conscience de tout cela — rien ne pouvait lui en donner conscience."
"Quelque chose" écrivait à travers Emily, quelque chose qui était elle sans qu'elle puisse tout à fait le revendiquer, et cette part la plus sauvage de son être n'était pas polie, n'était pas civile, ne brodait pas des napperons, n'écoutait pas sagement les discussions des hommes en sirotant une tasse de thé. Elle mourut trop tôt pour qu'on sache ce qu'elle serait devenue en tant qu'écrivain et en tant que femme, mais Elisabeth Gaskell la montre rétive à toute autorité extérieure, ce qui a sans doute précipité sa mort. Charlotte, elle, a vécu sa vie durant un profond déchirement entre l'écrivain puissant, indépendant et sagace qu'elle était, et la femme qu'elle voulait être, conforme aux exigences de la société de son temps. Sa santé en a porté longtemps les stigmates éprouvants, et elle est morte alors qu'elle s'était finalement mariée, à un homme qui n'aimait pas la littérature et ne lui laissait pas de temps pour écrire... et qu'elle était enceinte de trois mois.
Revenons à nos moutons : dès l'instant où, pendant des siècles, on a condamné les femmes qui osaient écrire autre chose que leur journal ou leur cahier de résolutions, ces dernières n'ont eu que des choix restreints : incarner une sorte d'identité scindée en plusieurs morceaux, comme Charlotte Brontë, parfois jusqu'à la folie ou jusqu'à la mort, ou assumer leur rôle de pionnières, et devenir les nouvelles amazones de leur temps. Stigmatisées en temps que femmes contre-nature, elles se sont réfugiées dans la littérature féministe, ce qui accentuait, par un effet-retour pervers, leur mise à l'écart. On peut faire le rapprochement avec la littérature gay : longtemps, les homosexuels qui écrivaient se dissimulaient avec art dans leur écriture, glissant çà et là des sous-entendus à l'intention de qui voudrait bien comprendre... de temps en temps éclatait un scandale qui les dévoilait violemment aux yeux de l'opinion, comme le procès d'Oscar Wilde, mais dans l'ensemble, ils arrivaient à se protéger ainsi de la vindicte publique. Puis est venu un temps d'affirmation, de manifestes, et la naissance d'une "littérature gay" qui était à double tranchant, comme la littérature féministe, car si elle leur permettait de s'exprimer dans leur vérité profonde, elle était aussi un "ghetto" qui limitait leur lectorat.
C'est pourquoi, même si je me sens profondément féministe quand je travaille sur le XIXème siècle pour un prochain roman..., je pense qu'un écrivain doit éviter de se ranger lui-même dans une catégorie (les éditeurs et les critiques s'en chargeront bien assez tôt !). Armistead Maupin, Sarah Waters, Dorothy Allison ou Stephen Mac Cauley (pour lequel j'ai un grand faible) sont bien plus que des "auteurs gay". Ils sont des écrivains de talent, et ça leur donne une puissance décuplée et plusieurs longueurs d'avance sur les manifestes et les slogans. Je m'explique : un homophobe ou un misogyne ne lira jamais de la "littérature féministe" ou "gay". Il s'en protègera aussi efficacement que des microbes, parce qu'il ne veut surtout pas mettre en doute ses certitudes. Alors qu'un écrivain universel, qu'il soit homme ou femme, et quelles que soient ses préférences sexuelles, ralliera à lui un lectorat bien plus large que ceux de son genre ou de sa famille, par la magie de l'identification. Quand un roman est réussi, le lecteur s'identifie au personnage, quand bien même il s'agit d'un être qu'il repousserait ou combattrait dans sa vie quotidienne. Et une fois qu'il a passé trois cent pages dans la peau de cet étranger, qu'il s'est approprié ses émotions, ses pensées, ses amours et son destin, il ne va peut-être plus regarder tout à fait de la même façon ceux qui lui ressemblent.
Je vous vois venir, vous allez me trouver utopiste. Mais j'assume. Je crois que le roman ouvre à plus de compréhension entre les gens. Et je le répète, je suis sûre qu'au pays des grands romanciers, hommes et femmes vivent en harmonie, même si ce n'est pas sans disputes littéraires...
Bonne journée à tous...
PS : Inutile de vous dire que je vous recommande les romans des sœurs Brontë !
27 commentaires:
Un billet des plus intéressant! Merci :D
Merci Allie ! Je sais que tu es une fan des sœurs Brontë et en particulier de Charlotte, et j'en profite pour signaler que ceux et celles qui veulent lire des notes de lecture sur leurs romans peuvent aller visiter ton site !
ah, ça fait du bien de lire quelque chose de censé sur les femmes,voilà qui me donne envie 1) de relire les soeurs Bronte, 2) de réfléchir plus longuement à ce que je viens de lire... à suivre donc! ;-)
Merci Alhya, et si tes réflexions t'inspirent des suites à mon texte, n'hésite pas !
Wahou !
ça fait du bien !
D'abord ça décrasse les neurones d'aller faire un tour sur ton site, ensuite, tes réflexions sur l'acte d'écriture font du bien. On se rend bien compte de la liberté de pensée mais également qu'il faut atteindre pour pouvoir écrire.
Merci
tout simplement
Et aussi "Ecore" !!!
Ouh, c'est gentil ça. Merci Beaucoup May !! C'est vrai qu'il leur en faut de la liberté de pensée, aux écrivains, mais surtout des lecteurs qui s'approprient leurs textes et leur donnent la force dont ils ont besoin ! Et même à mon niveau modeste, si ma chronique à pu te faire plaisir, je suis comblée. Voilà.
Les hauts de Hurlevent... ma première claque littéraire à l'adolescence... Je comprends ton agacement face à cette "sexualisation" du roman... j'aimerais faire un refléxion pertinente mais aujourd'hui, j'ai le cerveau aussi efficace qu'une compote de pommes: c'est bon mais ça ne pense pas... En tous les cas, merci pour toutes ces infos sur les soeurs Brontë :)
J'aime beaucoup ton expression, "le cerveau aussi efficace qu' une compote de pommes..." je connais ça !... En fait après avoir écrit un chapitre de roman, ou un billet (ce qui me demande du boulot parce que je n'arrive pas à stocker les infos très longtemps dans ma mémoire, hélas), et même parfois sans raison particulière... je suis dans cet état. J'en profite pour préciser qu'on n'est pas obligé de faire des commentaires pertinents sur mon blog : non, parce que sinon, ça va commencer à ressembler à l'école... et moi, à l'école, je m'efforçais de regarder dans le vide pour ne pas croiser le regard du prof et être interrogée !... un petit coucou suffit amplement à me réjouir, déstressez-vous et vive la compote de pommes.
J'aime beaucoup le sens de ta réflexion! et bravo pour "L'homme dérouté", dans lequel j'ai été littéralement emportée! je crois beaucoup en ces petits déroutages qui font parfois basculer d'une vie à l'autre. Tu as sûrement du lire "Quelqu'un d'autre" de T. Benacquista ? ça m'y a fait penser.
Pour en revenir à ton billet, que penses-tu de Virginia Woolf et de son écriture "séxuée"?
Merci mille fois Mariaba ! Je suis touchée par ton commentaire, et très heureuse que ma nouvelle t'ait plu... Je crois profondément aux déroutages : si on regarde bien, on en rencontre dans toutes les vies, et heureusement qu'ils sont là pour pimenter et dilater l'existence ! Je n'ai pas lu "Quelqu'un d'autre" (mais je vais !), j'aime beaucoup Benacquista depuis que j'ai lu "Saga", il y a des années, que j'ai offert ensuite à pas mal de copains... Quant à Virginia Woolf, je pense qu'elle a fait partie des pionnières, une pionnière très déchirée et très intelligente. Elle m'a toujours fascinée, troublée, mais ce n'est pas une de mes romancières préférées. Peut-être parce qu'il y a dans Virginia Woolf un vertige qui me rend triste chaque fois que j'ouvre un de ses livres ?...Et pourtant, je tourne autour d'elle, et je suis contente qu'elle existe dans le paysage littéraire...c'est paradoxal comme tu vois !
bonjour Gaëlle, tu es passionnée par la lecture et l'écriture ! je vais passer par ici souvent moi .. tes billets sont très plaisants à lire ! tellement que la première fois que je suis venue découvrir ton blog.. je me suis laisser prendre par la lecture de tes articles, je suis restée là un loong moment.. et en suis repartie sans même laisser un mot.
Bonjour et bienvenue Nziem ! Oui je suis une lectrice passionnée, et j'écris, mais je vais te faire une confidence : c'est parce que je dessine comme une savate... c'est pourquoi j'admire beaucoup ceux, comme toi, qui créent tout un univers avec quelques traits, un peu de couleur par-ci par-là... ah, j'admire aussi les musiciens, les danseurs.... Bref, tous ceux qui font ce que je ne sais pas faire, et qui nourrissent mes émotions et mon imaginaire.
à l'époque où j'étais dans une association littéraire, nous avons fait un numéro spécial de notre "canard à plumes" consacré aux écrivaines.
Parler d'une "écriture féminine" comme le fait souvent la presse, est d'une ridicule achevé. J'ai bien du mal à trouver "spécifiquement féminins" les livres de nathalie sarraute, de duras, de dorothy parker... Le fait de parler de femmes, en soi, n'est pas plus épécifiques puisque certains hommes ne parlent que de ça. Alors que reste-t-il? Dans certains cas, une littérature féministe (la plus qu'immense Toni Morrison), sans être nécessairement "féminine". Et souvent, comme chez tous les écrivains de talent, une écriture personnelle. Tout simplement.
Je n'ai encore lu aucune des Bronte. Mais mes étagères sont pleines d'écrivaines, qui me font voyager dans des univers différents. Quoi de commun entre Toni Cade Bambara (le sublime "Ce cadavre n'est pas mon enfant") et Christine Angot? Entre Venus Khoury-Ghata et Virginia Wolf?
bref, merci pour ce billet plein de sens et d'envies de lire :-)
Merci Arbobo de ce message avec lequel je suis, tu penses bien, complètement d'accord et qui me donne aussi des envies de lecture !! Car si je connais, aime et admire la grande Toni Morrison (qui est aussi, entre autres qualités, une voix immense de l'héritage afro américain, et une conteuse hors pair...), si j'ai lu aussi avec bonheur Toni Cade Bambara, je ne connais pas encore Venus Khoury-Ghata. J'ajouterai à ton message que par ex Michel Faber, une de mes grandes découvertes de l'année dernière, incarne si bien ses personnages féminins qu'il pourrait passer pour un auteur féminin, si ce n'est féministe... ce qui montre bien l'absurdité de ces classifications !
je reviens comme promis... après un temps certain... Oui, je crois que définitivement je suis de moins en moins persuadée que l'être humain soit réellement sexué dans l'expression de sa sensibilité, cela va au delà.. Je lisais, il y a quelques minutes pour ma thèse une citation de Sartre (qui d'ailleurs me pousse à penser qu'il va falloir que je lise cet auteur dont je n'ai fait que feuilleter les livres jusqu'ici) "je construis l'universel en me choisissant, je le construis en comprenant le projet de tout autre homme quel qu'il soit". je ne sais pas si tu vois le lien avec ton post, moi je le vois ;-))! Si l'existentialisme consiste à choisir son projet de vie, je crois que je suis existentialiste et que tout artiste, en se choisissant est dans l'universel, et ne peut, par conséquent être marqué du sceau de l'homme ou de celui de la femme...
Je vois le lien et j'aime beaucoup la phrase de Sartre !J'ajouterai que pour un artiste, l'universel se trouve en allant au plus profond de sa singularité, pas forcément, comme on pourrait croire, en ratissant large. Chacun peut se sentir touché par Jane Eyre qui raconte les aventures d'une orpheline du Yorkshire, et rester insensible aux platitudes de quelqu'un qui chercherait à s'adresser au monde entier.
J'aime beaucoup ton billet. Cette notion d'écriture féminine est en effet profondément agaçante, et je pense qu'il y a un machisme latent derrière cette idée, et je ne suis pas étonnée malheureusement, que les femmes soient moins éditées que les hommes.
Je suis d'autant plus touchée par l'exemple des soeurs Brontë, que j'avais adoré Jane Eyre et Les hauts de Hurlevent. Dans un registre plus léger, as-tu lu "L'affaire Jane Eyre" de Jasper Fforde ?
A Marmitedecathy : c'est trop gentil! Non, je n'ai pas lu "L'affaire Jane Eyre" mais je l'avais repéré de longue date (forcément, avec un titre pareil, tous les fans de Jane Eyre sont aimantés !) et il fait partie de la longue liste des romans à lire dans le futur... le problème c'est que j'ai les yeux plus gros que le ventre, et je ne lis pas assez vite pour toutes mes envies ! Tu as aimé le livre de Jasper Fforde, toi ?
Oui, la mise en situation est un peu longue car le sujet est délirant, mais j'ai beaucoup aimé l'idée de départ : des gens se balladent dans nos romans fétiches et peuvent en changer la fin, c'est dur à raconter. En résumé, un peu dur à lire car touffu et part dans tous les sens, mais sujet particulièrement délirant qui m'a vraiment plu. Je viens de lire la suite et ça se passe dans Dickens que je connais moins. Si tu aimes Jane Eyre, n'hésite pas , c'est vraiment amusant ! Ca te fera quelque chose de sympa à lire pendant les vacances.
Moi aussi, je suis utopiste, et quand j'écris, je n'écris pas en tant que femme...
Et moi aussi, je suis fascinée par la famille Brontë. Jane Eyre et Les hauts de Hurlevents ont hanté mon enfance, mon adolescence et mon âge adulte.
Donc merci pour cette note admirable, partie d'un article qui m'avait moi aussi interpellée, mise mal à l'aise. Mais, prise par le temps, je n'avais pas "creusé" ce malaise. Tu t'en es chargée pour moi, et je t'en remercie.
Merci à toi !Je sens que décidément, nous étions faites pour nous rencontrer ! Internet a comme ça des côtés magiques. On y rencontre des gens par l'intime, ce qui nous touche et nous interroge, sans perdre de temps à tourner autour des choses importantes. Je suis donc très heureuse de cette rencontre, et pressée de te lire davantage !
je viens de trouver votre site , ouah! ça fait du bien... je termine un livre de stephan mac cauley; ses descrptions de la famille sont trés pointues et si il existe des " cases" pour les écrivains,pourquoi pas ? on perds le goût, le sel, le piquant de la vie à vouloir être tous pareils, vive la diversité et aussi laissons hurler les autres! une mamy.
Bonjour Yvana. Vous avez tout à fait raison, vive la diversité, il ne s'agit pas de vouloir être tous pareils, quelle horreur... C'est juste qu'on peut être chacun une personne à part et s'enrichir mutuellement de nos différences, sans se sentir prisonniers d'une étiquette, même si l'on aura toujours quelques préjugés qui traînent par ci par là ! Pour moi les cases, ces étiquettes dont nous avons tant besoin pour ranger les gens par catégories, freinent les rencontres... Bienvenue chez moi et merci de votre message !
Pris d'une envie subite, j'ai commencé à avaler ton article, lorsque j'ai réalisé que je n'avais jamais lu une seule ligne d'Anne (je ne suis pas le seul, d'ailleurs les trois quarts du temps tout le monde l'oubli, la pauvre). Je pense donc que je vais m'y atteler.
(en espérant que ce soit mieux qu'Emily, et moins poissard que Charlotte :-)
Thom, rien n'égale ta bravoure quand il s'agit de lire mes archives.(sourire) Je suis presque dans le même cas car j'ai lu "Agnès Grey" il y a des siècles (comme je suis très vieille) et moi c'est carrément le roman ET l'auteur que j'ai oubliée ! A te lire une mauvaise conscience me saisit : déjà que de son vivant la pauvre Anne se faisait tout le temps oublier tellement elle était discrète... je crois que je vais lire "La Locataire de Wildfiel Hall" mais à mon avis c'est un peu poissard aussi...
De pus il vaut toujours mieux ête anglo saxonne si l'on est femme (là, il y en a beaucoup!Et des meileures) Car même avec un prix Nobel, des récompenses, les femmes non-anglphones sont rjetées: Gabriela Mistral (pix nobel), Alba de Cespédes, et,pire: une Sarde! Alors là! Prix Nobel elle aussi: Gracia Deledda! Et voici c qu'un de ses compatriontes a dit d'elle, pour elle:
"Reviens, reviens, petite enragée d’écriture, dans le potager de ton père, pour y cultiver l’œillet et le chèvrefeuille. Reviens, pour tricoter des chaussettes, pour devenir adulte et attendre un bon mari et te préparer un bon avenir de joies familiales et de maternité" .
Grazia Deledda, Cosima, la jeunesse d’une poétesse.
Sympa, non? MAis le public général est encore pire que ce bonhomme! CAr au sexisme s'ajoute la méconnaissance de toute littérature non anglo-saxonne! Ce qui nuit à cette dernière, devenue répétitive, pleines de clichés (qui réjouissent un certain public!), contibue à l'ignorance générale et enlève de merveilleux plaisis aux lecteurs mal informés!
Bonjour,
bonne année 2008 tout d'abord. Pourquoi ne publiez vous pas dans le cadre d'édition menée par des femmes. Les éditions des femmes y ont largement contribué. Personnellement, si je ne m'était pas rendu dans ce lieu, j'aurais été aussi désabusée. Alors tenté en leur sein votre aventure.
Artemisia
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