30 octobre 2006

Michel Faber, le "Victorien" avant-gardiste

Bonjour à tous !

Me revoilà. Je déroge à mes devoirs pour venir écrire ici, alors il me fallait une bonne raison. Et quelqu'un qui ne rougisse pas trop de se retrouver à côté de Chandler.
Donc... Michel Faber.


Je vous vois d'ici : "Ça y est, elle va encore nous enquiquiner avec la Rose pourpre et le lys, je le vois d'ici !"

Euh... Vous n'avez pas tort, mais ce n'est pas tous les jours, dans une vie de lecteur, qu'un livre vous saisit avec la rapidité d'un aigle, vous fait visiter un monde qui n'a rien d'un décor peint où rien ne suinte, et finit par desserrer son étreinte juste assez pour vous laisser choir, épuisé et reconnaissant. Frustré aussi.

Car La Rose Pourpre et le Lys, ce chef-d'œuvre de "moderne victorien", vous laisse sur votre faim. L'auteur vous a savamment pris par la main pour vous transplanter en plein XIXème siècle à Londres, vous attacher aux pas de tous ses personnages, de Caroline la petite prostituée des bas quartiers à Sugar, celle qui est "mieux côtée", de Sugar et son monde âpre et vénéneux, de cette antre sans chaleur à l'univers feutré des bourgeois qui se pincent le nez mais vont au bordel, de William Rackham le parfumeur en pleine ascension sociale à sa femme Agnès, malade à crever pour une autre raison que ses nerfs ébranlés... d'Agnès à Sophie, la petite fille qu'elle a eue mais qui doit se cacher car elle est la preuve d'une impureté charnelle qu'Agnès ne peut souffrir... de Sophie aux petites bonnes de la maison, au peuple des cuisines qui recueille parfois cette enfant privée d'amour, comme une plante privée de lumière...
Et quand vous vous êtes étroitement attaché à ces personnages nombreux, complexes à l'envie, quand vous avez tremblé pour eux, éprouvé de la pitié, de la répulsion, de l'appréhension, du désir, du mépris.... hop, ils s'en vont, le narrateur vous congédie sans que vous ayiez votre mot à dire. Le rideau se baisse, les destins demeurent suspendus, pour certains.

Donc ce livre vous laisse essoré et hanté pour longtemps. Il y en a peu, des comme ça, de nos jours. On peut les compter sur les doigts d'une seule main ; des deux mains, ce n'est pas sûr.




Il était temps, par conséquent, que je me penche avec vous sur l'homme qui a réussi cette magie, dont je n'étais pas sûre qu'elle fût possible avant de croiser son livre: à la fois un roman parfaitement fidèle à l'époque victorienne, à tel point qu'on croirait que l'auteur en revient, et si moderne dans la forme, dans le propos. Nul anachronisme.
Mais Dickens, dont on sent si fort l'influence et l'humanité derrière celle de l'auteur, eût rougi à chaque page, et/ou applaudi, et craint deréchef un procès destiné à perdre cet auteur audacieux. Il eût envié cette facilité à entrer dans le cerveau d'une femme "folle", dans celui d'une prostituée, ce "bas du bas" de toutes les sociétés, et même dans celui de cet homme qui croit qu'une femme s'achète comme un cheval, et que c'est sans conséquences...

En réalité, ce billet aurait aussi bien pu s'intituler :
DES CONSÉQUENCES D'UN TRÈS BON LIVRE SUR SES LECTEURS... ET SUR L'AUTEUR.

Michel Faber a plus de quarante-cinq ans, il est né en Hollande. De là, il a migré tôt avec sa famille en Australie, et vit maintenant en Ecosse, dans une gare désaffectée des Highlands.
Il a mis 20 ans à écrire La Rose pourpre et le Lys : le titre anglais, The crimson petal and the white, est tiré du début d'un poème de Lord Alfred Tennyson :

" Now sleeps the crimson petal, now the white;
Nor waves the cypress in the palace walk;
Nor winks the gold fin in the porphyry font:
The fire-fly wakens: waken thou with me.

Now droops the milkwhite peacock like a ghost,
And like a ghost she glimmers on to me.

Now lies the Earth all Danaë to the stars,
And all thy heart lies open unto me.

Now slides the silent meteor on, and leaves
A shining furrow, as thy thoughts in me.

Now folds the lily all her sweetness up,
And slips into the bosom of the lake:
So fold thyself, my dearest, thou, and slip
Into my bosom and be lost in me."


Holly, si tu veux traduire, comme je sais combien tu aimes traduire la poésie... tu es la bienvenue !





Michel Faber dit que son titre, inspiré par le début du poème, n'est pas directement relié au roman, ou plutôt que c'est plus complexe :

Littéralement, "The crimson petal", le pétale écarlate, pourrait être Sugar, la prostituée, et tout ce qu'elle représente, le désir, la noirceur, la passion sensuelle. Et le pétale blanc serait Agnès, la femme de William Rackham, atteinte d'une tumeur au cerveau, information que seul détient le lecteur, tandis que ses contemporains ne voient en elle qu'hystérie, ébranlement nerveux grandissant. Ce "pétale blanc", ce lys, ne se rêve que pur, convoyé par des religieuses surnaturelles vers un au-delà paradisiaque. Le sang menstruel est pour elle une atteinte satanique répétée, un châtiment sans doute mérité, dont on ne peut parler. Ainsi le pétale blanc devient-il sanglant chaque mois, stigmates d'une tâche originelle, tandis que le pétale écarlate, Sugar, apparaît une nuit à Agnès comme son ange gardien. Elle n'en démordra plus, en cherchant partout la trace en vain, en guettant la silhouette.

Ajoutons que William Rackham, homme à la veulerie ordinaire, serré entre ses deux femmes, une qui ne se laisse pas toucher et l'autre qui se laisse toucher à des fins précises, est parfumeur, comme le souligne Faber : son métier est donc de manier toutes sortes de pétales pour en extraire le suc. Il respire Sugar sans se douter de ce que son parfum recèle de ferme résolution. Il respire Agnès parce qu'elle lui appartient de droit, comme Sugar lui appartient car il l'a achetée, mais sans se douter que dès qu'il approche son épouse, elle le fuit, empruntant aussitôt le corridor de sa folie.

Bref. Autant vous dire que ce roman de 1200 pages se lit en un rien de temps, bien que superbement écrit. Dès les premières pages, on tente de freiner sa lecture de peur de le finir trop vite. Pour en savoir plus sur La Rose pourpre, vous pouvez lire ceci ou cela, bien mieux développé par Holly...

Mais revenons à l'auteur. Voilà qu'il publie aujourd'hui Les contes de la rose pourpre, une sorte de suite à l'histoire. Et dans la préface, il raconte pourquoi ce livre de nouvelles s'est en quelque sorte imposé à lui, bien que la raison soit sûrement et avant tout son envie de retrouver certains personnages, ou d'en explorer d'autres. Mais enfin voilà le constat qu'il nous livre :

"Je ne peux que présumer qu'il y eut très peu de lecteurs de mon roman, la Rose pourpre et le lys, pour être allés droit à la dernière page, car is ont été un trop grand nombre à me faire savoir combien ils se sont sentis orphelins une fois arrivés là."

Il ajoute ensuite qu'il a ressorti la caisse de lettres reçues de ses lecteurs, et en livre quelques extraits que je trouve exquis, même si je ne partage pas leur avis :

Ainsi, un habitant des Pays-Bas lui écrit ceci : "L'histoire se termine car, à l'évidence, vous avez dit tout ce que vous aviez à dire... Pourtant je voudrais vous demander une suite, pour les raisons suivantes : [...] Dans ma vie il y a eu un certain nombre d'adieux soudains et irrévocables, qui m'ont laissé des sentiments durables de douleur et de culpabilité. Pourquoi me faites-vous souffrir davantage ?"

Je trouve cette lettre à la fois touchante, et gonflée... Mais avant tout, elle dit bien comment un écrivain parvient, quand il est très bon, à insuffler tant de vie à ses personnages que le lecteur ne peut les quitter sans souffrance.

Faber poursuit, les extraits de lettres se succèdent, réclamant une suite tantôt avec colère : "Comment osez-vous, monsieur ? Quelle fin !" ou tantôt en suppliant : "J'aurais facilement pu lire mille pages de plus. Je vous implore donc, s'il vous plaît, s'il vous plaît, S'IL VOUS PLAÎT, écrivez une suite à l'histoire."

Là, on sent bien que la politesse est de pure forme, c'est un ordre déguisé !

Un autre affirme, péremptoire : "Les romans ne sont pas censés s'arrêter comme ça, tout simplement ! Les romans ne sont pas comme la vraie vie. Les romans sont censés avoir des fins satisfaisantes et bien ficelées."


Evidemment, là je pense aussitôt à Misery (ah, que feraient certains lecteurs s'ils pouvaient détenir Michel Faber quelques mois chez eux, et le forcer à écrire avec le bas du corps en bouillie...), mais aussi à Sir Arthur Conan Doyle forcé de ressusciter Sherlock Holmes devant un tollé général... Nous appellerons ça la tyrannie du lecteur.

A ces lecteurs tyranniques je préfère ceux qui respectent le bon vouloir de l'auteur (c'est LUI qui décide, bon sang !) et font avec... comme celui-ci, par exemple :

"Je viens à l'instant de faire mes adieux, sachant qu'il doit en être ainsi. Toute la semaine il a fallu que je me pince pour me rappeler que mes nouveaux amis ne dureraient pas toujours — seulement jusqu'à la fin de la semaine ou peut-être un peu plus longtemps. Maintenant ils sont partis — j'espère pour un destin meilleur."

Ou ce dernier lecteur, ma lettre préférée entre toutes :

"Quelques jours avant Noël, j'étais à moitié éveillé et la première pensée qui m'est venue était ce que je pourrais offrir comme cadeaux de Noël à Miss Sophie, Sugar et Mrs Fox. Puis je me suis rappelé qui elles étaient."



Pour comprendre combien Faber s'attendait peu à ce mouvemement de masse de ses lecteurs, il faut se pencher sur une interview passionnante qu'il a donnée à C. P. Farley, en compagnie de sa compagne Eva, partenaire attentive durant toute l'écriture de la Rose pourpre, et dont vous trouverez l'intégralité ici.

L'auteur y explique qu'il a écrit trois versions successives de son roman, et que durant les vingt ans qui ont abouti à la version finale, il a évolué en même temps que son histoire. Il faut dire qu'il a commencé très jeune, à une vingtaine d'années... autant dire au berceau, pour un écrivain ! (Oui Thom, la vingtaine, pour un romancier, c'est le berceau.) Longtemps, il a écrit pour ce qu'il appelle le "Dieu de la littérature", cette entité qui "lit vos trucs et dit soit "Ouais, ça va faire l'affaire" ou "Non, ce n'est pas assez bon." Il ajoute "Je n'avais pas idée de toucher des lecteurs, de vrais êtres humains."

Peu à peu, au fil de longues conversations nocturnes avec sa patiente Eva, à 4h du matin, nous est-il précisé... (Eva, tu as toute mon admiration), s'est posé le débat suivant : doit-on inclure le lecteur dans le processus d'écriture ?

C'est toute la question de la littérature actuelle qui est posée, en fait, et même de l'art en général. On écrit d'abord pour SOI, en principe. Pour nombre de raisons : répondre à ses propres questions, régler d'anciens comptes, comprendre un peu mieux comment marche le monde, se démultiplier à travers d'autres vies que la sienne ou mieux trouver sa place microscopique dans l'univers... allez savoir.

Puis, la maturité venant, les romanciers commencent à prendre en compte le lecteur. Hitchcock écrivait ses scénarios en incluant systématiquement le spectateur, et en jouant avec lui. Beaucoup d'auteurs font de même. Mais ça nécessite de se poser toutes sortes de questions techniques (quel point de vue adopter ? Quelles sont les informations que le lecteur doit connaître pour ne pas être trop perdu ? Lesquelles doit-il impérativement ignorer, sans qu'il nous en veuille au final de les lui avoir cachées ? Doit-on le supposer très intelligent ou très bête ? etc.) et éthiques : la fameuse question de la sincérité dont parle beaucoup Chandler : écrire, c'est forcément truquer un peu. Mais on peut truquer plus ou moins sincèrement. Chandler dit que le lecteur ne supporte pas qu'on l'ait complètement roulé dans la farine par des procédés douteux, par exemple en lui cachant des informations capitales, ou en le lançant sur de fausses pistes sans autre but que de le leurrer pour faire sa petite affaire sans lui.

On peut aussi écrire sans songer un instant au lecteur : qu'il aille se faire pendre celui-là, s'il ne comprend pas les fabuleux méandres de mon cerveau, s'il ne connaît pas sa trigonométrie, s'il n'est pas foutu de s'élever jusqu'à moi. Je ne m'intéresse, comme un prof pète-sec, qu'à ceux qui ont un cerveau de taille suffisante pour me suivre. Les autres rateront l'examen d'office et iront lire du Harlequin.

En d'autres termes, il y a les romanciers qui écrivent pour des agrégés de lettres, au minimum.... d'autres qui écrivent avec des phrases de cours primaires, histoire d'être sûrs d'accrocher le public moyen d'un jeu télévisé, (ce qui n'est pas toujours un bon pari)... et ceux qui tentent de naviguer entre les deux, et partent du principe qu'on peut donner le meilleur de soi-même, aller le plus loin possible, sans pour autant exclure la majorité des lecteurs, lesquels ne demandent qu'à être mieux nourris que ce qu'on leur sert en général. Michel Faber appartient à la dernière catégorie, vous l'aurez deviné.

Toutes ces questions, Faber se les est si bien posées, qu'à la fin il écrit un livre qui prend le lecteur par la main dès la première page :

"Faites attention où vous posez les pieds. Gardez toute votre tête ; vous allez en avoir besoin. La ville où je vous emmène est vaste et compliquée, et vous n'y êtes jamais allé. Vous croyez peut-être, de par certaines histoires que vous avez lues, que vous la connaissez bien, mais ces histoires vous ont flatté, vous accueillant comme un ami, vous traitant en familier. La vérité, c'est que vous êtes un étranger venu d'une époque et d'un lieu complètement différents."




Et à la fin, quand tout est consommé, il le congédie ainsi :

" Et à vous aussi : adieu.
Une séparation brusque, je sais, mais il en est toujours ainsi, n'est-ce pas ? Vous pensez que cela durera toujours, et soudain, c'est fini. Je suis content que vous m'ayiez choisi, cependant ; j'espère que j'ai satisfait tous vos désirs, ou au moins que je vous ai fait passer un bon moment. Nous avons été si longtemps ensemble, et nous avons vécu tant de choses, et pourtant je ne connais même pas votre nom !
Mais maintenant il est temps de me laisser partir."


Quand j'en suis arrivée là, j'ai applaudi silencieusement. Un artiste accompli ne fait que ce qu'il veut. Il peut bien employer à sa guise le langage de Sugar "J'espère que j'ai satisfait tous vos désirs", il fait comme elle : il n'en fait qu' à sa tête. Il ne cède jamais à la complaisance. La générosité littéraire, c'est de "se vider de son sang à chaque page", comme dit Chandler. Pas de servir les plats, ni de faire en sorte que le lecteur, toutes ses questions apaisées par de fausses réponses, puisse s'endormir comme un enfant de trois ans.


Bref. Devant tout ce courrier de lecteurs "orphelins", "sonnés" par sa fin, comment a réagi Faber ? S'est-il laissé fléchir ?
Hé hé hé. Là, je vous tiens. Suspense...

Et je m'offre une anecdote, tiens, pour le faire durer : Charlotte Brontë écrivait son dernier livre, Villette, lorsque son père lui demanda si pour une fois elle ne pourrait pas faire en sorte de le terminer sur un happy-end, et que le héros et l'héroïne, comme dans les contes, "se marient et aient beaucoup d'enfants".
Elisabeth Gaskell nous révèle dans sa biographie comment Charlotte résolut ce dilemme:

"Mais l'idée de la mort de M. Paul Emmanuel dans un naufrage s'était imposée à son esprit de telle sorte qu'elle semblait presque réelle, et elle ne pouvait pas plus changer la fin de son récit qu'elle n'aurait pu changer la réalité.
Tout ce qu'elle put faire pour satisfaire au désir de son père fut de voiler le destin de son personnage par des paroles sibyllines et de laisser au lecteur, selon son discernement et son caractère, le soin d'interpréter leur sens."


Et... que croyez-vous qu'ils firent, les lecteurs ? Ils écrivirent à Charlotte... pour se plaindre ! Ils voulaient savoir, sur le champ, ce qui arrivait vraiment A LA FIN.
Comme quoi... rien ne change... C'est l'éternel jeu entre le romancier et son lecteur : Je te dirai ce que je veux bien te dire, et tu me réclameras ce que tu veux despérément savoir. Car il te faut des certitudes, et moi j'aime le flottement, ce qui n'est pas dit, à peine suggéré. Et puis parce que tu es un peu feignant (si si) et que moi, je veux que tu t'appropries si bien les personnages que tu sois capable, comme lorsque tu étais enfant, de leur imaginer une vie entière après avoir refermé le livre.

Revenons à Faber. Voilà comment il s'en est tiré. Avec maestria, ce qui n'étonnera pas ses lecteurs :

"Je n'ai pas répondu à autant de lettres que j'aurais voulu, parce que je me suis fatigué d'expliquer qu'il n'allait pas y avoir de suite. [...]
Quoiqu'il en soit, la fin de la Rose pourpre n'est pas si soudaine qu'il peut sembler à première vue. Relisez les derniers chapitres, et vous verrez qu'il s'y déroule un processus graduel de séparation, de baissers de rideaux, que la narration tire successivement sa révérence à chacun des personnages principaux. Oui, leur avenir est incertain ; mais ainsi est le nôtre.

Me voici donc, en 2006, en train de présenter un recueil d'histoires issues de La Rose pourpre. Ai-je changé d'avis à propos des suites ?

Non. C'est un livre d'histoires dont les héros sont des personnages de la Rose pourpre et le Lys. Vous n'avez pas besoin d'avoir lu ce livre afin d'apprécier celui-ci. Les histoires sont, ainsi qu'elles devraient être, de petits mondes en soi.

Certains personnages de ces nouvelles histoires sont beaucoup plus jeunes qu'ils ne l'étaient dans le roman, certains sont beaucoup plus vieux. L'un des contes met en scène le fils de l'un des personnages de la Rose pourpre, qui évoque l'époque édouardienne dans les années 1990 — pour nous rappeler que quelques vies suffisent à nous relier aux siècles lointains."


Élégante parade, n'est-ce pas ? Et il ajoute, futé :

"Les conte rassemblés ici possèdent une intégrité narrative, et si la Rose pourpre n'avait jamais existé, j'aurais voulu les écrire quoiqu'il en soit.
[...] Mais pourquoi ces personnages, et pas d'autres ? Pourquoi ce mince volume, et pas plus ? Parce que c'étaient les contes qui exigeaient d'exister. D'autres personnages excitaient ma curiosité, des personnages avec lesquels j'aurais aimé passer plus de temps. Ils ont poursuivi leur route, disparu dans L'Histoire. J'ai dû les laisser partir.
Mon seul regret est de ne pas être parvenu à écrire une histoire sur Henry Rackham, un homme bien qui méritait bien plus qu'il n'a eu dans la Rose pourpre. Je lui ai donné une chance de vivre à nouveau, plus jeune, enfant même. Je l'ai supplié de saisir l'occasion d'exprimer ce qu'il avait été trop timide pour exprimer la première fois. Il est resté trop timide.
Il faut respecter de telles choses."


Là, un lecteur qui n'a jamais écrit de fiction pourrait croire qu'il joue. Mais non, j'affirme qu'il est sincère, et qu'il vient de découvrir avec La Rose pourpre une drogue dont on ne peut plus se passer une fois qu'on y a goûté : la liberté des personnages qui échappent à leur créateur. Je l'ai vécue il y a peu, et n'envisage plus de m'en passer, je sais de quoi je parle. Et pour Faber, je me permets d'affirmer, oui. Sur la foi de cette interview dont je parlais. Parce qu'il n'en fut pas toujours ainsi pour lui, de son propre aveu.
Quand on commence à écrire des romans, durant son "enfance de romancier", il l'explique fort bien (cela concerne les premières versions de son roman, et pas mal d'années), on pense qu'on peut faire ce qu'on veut des personnages, les tordre dans un sens ou dans l'autre pour faire fonctionner son scénario selon ses plans. Faber l'exprime ainsi :

"I think in the first version of the book I saw the characters very much as tools, as puppets. Because I'm good writer I was able to make them credible, to give them an aura of being human. Whereas, if i'd been a less talented writer, they would have been ciphers or chess pieces. But deep down they really were still puppets of a certain very dark, negative, deterministic worldview.
I think in the last version, it really feel as if I was giving them free will, as if I was allowing them their humanity, and was sort of watching to see what they would do with it."


Il ajoute que dans la dernière version du livre, et jusqu'à la fin, il ne savait pas, en toute sincérité, si Sugar allait survivre ou non, si elle y parviendrait.

Les lecteurs pensent souvent qu'on plaisante quand on s'étonne de ce qu'un personnage ait pris chair si fermement qu'il fout en l'air une partie de notre histoire, qu'il faut alors reconstruire selon ses désidératas, respectant sa "volonté humaine", son existence propre, et sinon... le forcer à respecter l'histoire et étouffer son existence, le rendre aussi docile qu'une marionnette...

Cela a beaucoup à voir avec la manière d'être des parents, en fait. On peut vouloir à toute force que son rejeton rentre dans le moule prévu à son intention, pour son bonheur ça va de soi... Qu'il soit énarque, avocat, médecin, épouse telle ou telle fille, ait tant d'enfants etc... ou bien on peut considérer qu'on est là pour l'aider à devenir lui-même le mieux possible, comme un tuteur sur un arbuste, destiné à disparaître le jour où l'arbre prendra toute son amplitude.

Autant dire que je préfère, dans les deux cas, qu'on ait l'humilité d'admettre qu'on n'est que le vecteur qui permet à une vie de prendre force et consistance, et que le reste ne nous appartient pas. Ce qui, par contre, nous incombe, c'est de donner à cette vie tous les moyens possibles d'advenir et de s'exprimer avec sa voix singulière. Ainsi, nous quittons l'état flatteur de Dieu-tout-puissant pour devenir le spectateur étonné de ce qui se passe et se sert de nous, pour arriver sur la page ou dans le vrai monde.


C'est à ce genre d'évolution, qui demande beaucoup d'années, de doutes, de questionnements à 4 heures du matin... (seul ou accompagné), que l'on reconnaît un vrai romancier. Si ses personnages sont des pantins, si son histoire seule compte, s'il est au centre de cette histoire et veut nous imposer son avis sur telle ou telle question et que les personnages ne sont que de pauvres satellites, alors, c'est raté.

Bon, il est temps de vous offrir un extrait de ces fameuses nouvelles, qui sont un régal... Les lecteurs de la Rose Pourpre y retrouveront le Londres de Faber, les rues crasseuses, les prostituées, la façon dont on raille les vieilles filles au grand cœur qui veulent changer le monde, les bizarreries sexuelles des clients, l'humour, la noirceur, et l'esprit des suffragettes...

Dans une des nouvelles, "The Apple", qui donne son titre anglais au recueil, on retrouve Sugar, des années avant que son destin ne croise celui de William Rackham. Un incident fâcheux mettant en jeu une pomme et un enfant maltraité la pousse à se découvrir physiquement mais surtout, ce qui est bien plus grave pour elle, à dénuder cette fragilité qu'elle cache avec un soin maniaque. Il lui fait alors calmer son cœur qui s'emballe, se ressaisir, parce qu'un jour, elle le sait, viendra LE moment qu'il lui faudra saisir sans trembler :

"Une fois encore, Bon Dieu, elle s'est laissée emporter. Elle ne sortira jamais de Silver Street si elle continue comme ça. Seule la résolution la plus ferme et le cœur le plus froid la sauveront de cette vie de sujétion. Un jour viendra, sans se faire annoncer, où une occasion d'échapper à son destin lui sera offerte, et elle doit être prête pour ce jour-là. Un homme puissant entrera par hasard dans sa vie, avec l'intention de l'utiliser une fois avant de disparaître de nouveau dans ses hautes sphères. Mais dans la chaleur du moment, il lui échappera une confession, ou il lâchera un nom qu'il désirait garder secret, ou peut-être que simplement elle lui tapera dans l'œil et voilà qu'il sera attrapé. Cela pourrait arriver de n'importe laquelle d'une centaine de façons qu'elle ne peut même pas imaginer en cette matinée comme les autres dans sa chambre horriblement familière au papier défraîchi, aux plinthes pourries et aux draps froissés. La seule certitude est que cette occasion ne se présentera qu'une seule fois et son esprit devra être clair et ses émotions muselées."


Voilà, vous venez de faire la connaissance de Sugar. Vous pouvez maintenant, si vous ne l'avez pas fait, bande de petits veinards, attaquer la Rose pourpre en version poche...







Quant à ceux qui l'ont fait, consolez-vous de l'avoir fini... avec ces nouvelles. Vous n'aurez pas tout perdu, au contraire. Voilà du rab. Et il est délicieux.


Et pour les incorrigibles qui resteraient insatisfaits après avoir dévoré les Contes de la rose pourpre, je ne vois plus d'autre solution que de vous laisser en tête-à-tête avec la conclusion de la préface de Michel Faber :

" Et voilà tout. Je comprends que des lecteurs persistent à vouloir en savoir plus [...]. En relisant ma correspondance, j'aimerais connaître ce qu'il est advenu de certains lecteurs qui ont pris la peine de m'écrire. L'homme qui avait un cancer et lisais La Rose pourpre à l'hôpital, est-il en vie ? La prostituée qui m'a dit qu'elle abandonnait la partie pour retourner à l'enseignement, l'a-t-elle fait ? Et ainsi de suite. Je ne le saurai peut-être jamais."


Avouez qu'il se défend remarquablement, cet homme-là.

Sur ce... bonne lecture !

20 octobre 2006

Chant d'amour à Raymond Chandler

Bonjour à tous !

Ce petit billet est dédié à C.F. et à M.L., en espérant qu'ils se reconnaîtront et en feront leur miel.

Je sais, je me fais rare... Mais je dois rendre ma copie fin novembre, et je corrige, j'enlève quelques petites choses par-ci, j'en rajoute par-là... et pour me délasser, je lis James Matthew Barrie, et Raymond Chandler. Figurez-vous que je dois me battre pied à pied pour que le jeune héros de mon roman continue à lire du Chandler. Ça m'agace. Alors pour narguer un peu ceux qui tiennent à faire sauter ce nom (qui ne sautera pas, je suis têtue !), j'ai décidé de vous parler de cet auteur que je vénère, bien qu'il soit mort depuis un bail. J'ai fait sa connaissance (pas en chair et en os, je ne suis pas si veinarde) à l'âge de 14 ans. Sa fréquentation m'a fait un bien fou, tant il était élégant, spirituel. Assez vite, je me suis aperçue que ses livres étaient mieux traduits par Boris Vian... Ce qui limitait le choix, à moins se pouvoir se délecter en anglais (problème récurrent chez moi !) de son style inimitable. Donc Holly, après avoir traduit tout Barrie et tout Lewis Carroll, que dirais-tu de t'attaquer à Chandler ?




Si j'ai décidé de vous parler aujourd'hui de mon ami Raymond Chandler (car tous les écrivains qui m'ont un jour consolée deviennent mes amis, même si la majeure partie l'ignorent parce qu'ils sont morts, et que les vivants ne le savent pas non plus, pour la plupart, étant donné qu'on ne s'est rencontrés qu'à travers leurs livres...), c'est parce que je viens de tomber sur sa correspondance, qu'on ne trouve plus guère qu'en occasion, et que c'est une mine d'or. Il y parle de lui, de ses amis, de sa femme qu'il a aimée jusqu'à sa mort et dont il disait :

"Ce n'est pas par principe que j'ai été fidèle à ma femme mais parce qu'elle était tout à fait adorable, et que je n'ai jamais été touché par ce besoin de changement qui afflige beaucoup d'hommes à un certain âge, quand ils croient avoir manqué beaucoup de jolies filles. J'avais déjà trouvé la perfection. Plus jeune, elle avait des accès soudains et brefs de mauvaise humeur, et elle me lançait des oreillers à la tête. Cela me faisait juste rire, j'aimais cette fougue. [...] Et elle gagnait toujours, non pas parce qu'elle usait délibérément de son charme au moment crucial, mais parce qu'elle était simplement irrésistible sans même le savoir ou s'en soucier. Et il lui a fallu mourir centimètre par centimètre. Je suppose que, d'une manière ou d'une autre, il faut payer."

Avouez que c'est à tomber, même si la fin est tout à fait glaçante.... Allez, une petite dernière à propos de sa femme perdue :

" Pendant trente ans, elle fut le battement de mon cœur. Elle était cette musique que l'on entend, au bord de l'inaudible. Mon plus grand regret, maintenant inutile, est de n'avoir jamais rien écrit digne de son intérêt, de ne pas avoir fait un livre à lui dédier. J'y ai songé, mais je ne l'ai pas fait. Peut-être n'aurais-je pas pu l'écrire. Peut-être comprend-elle maintenant que j'ai essayé, et que le sacrifice de plusieurs années d'une carrière littéraire assez insignifiante m'a semblé un petit prix à payer, si j'ai pu la faire sourire quelques fois de plus."

Il y a vraiment de quoi émouvoir un fantôme, non ? On a pu appeler Chandler "le gentleman de Californie", et il ne l'avait pas volé. Les gentlemen, les vrais, ont toujours été une espèce rare... Voyez comme je suis maligne. Je vous ai attachés d'office à la personne de Chandler. Au moins les filles. Je me trompe ?

Mais il y parle surtout de son métier, et il est certain qu'il avait plus d'un tour dans sa manche, une idée claire de ce que devait être un bon livre, une dent contre les interviews et les classifications littéraires... bref un homme d'une sympathie exquise.

D'abord, voici comment Chandler décrivait son personnage, le célèbre détective Philippe Marlowe :


"Le long de ces rues vicieuses, un homme doit marcher, qui n'est pas lui-même vicieux, ni souillé, ni craintif... Il est le héros ; il est tout. Il doit être un homme complet et un homme commun et, cependant, un homme inhabituel. [...] Il doit être le meilleur dans son monde et suffisamment bon pour n'importe quel monde. Je me fous pas mal de sa vie privée ; ce n'est pas un eunuque ni un satyre ; je pense qu'il pourrait séduire une duchesse et je suis sûr qu'il n'abîmerait pas une vierge ; s'il est un homme d'honneur dans son domaine, il l'est dans tous.
" C'est un homme relativement pauvre, sinon il ne serait pas détective. C'est un homme du peuple, sinon il ne pourrait pas se mêler au peuple ; il possède une certaines psychologie des hommes, sinon il ne pourrait pas exercer son métier. Il n'acceptera pas de l'argent malhonnêtement et il n'acceptera aucune insolence. [...] C'est un homme solitaire et fier et il attend de vous que vous le traitiez en homme fier, sinon vous serez désolé de l'avoir jamais rencontré. Il parle le langage de son temps — c'est à dire avec un humour brutal, un sens vivant du grotesque, le dégoût de la vulgarité, le mépris de la petitesse.
" Notre histoire est l'aventure de cet homme à la recherche d'une vérité cachée et ce ne serait pas une aventure si elle n'arrivait pas à un homme fait pour l'aventure."


Lui-même était né à Chicago en 1888, mais il était parti à l'âge de huit ans pour Londres avec sa mère divorcée, et quand il regagna les Etats-Unis à l'âge de vingt-quatre ans, il avait assimilé toute une culture classique et européenne, qui lui donnait certaines armes pour se défendre, par exemple, contre les correcteurs des maisons d'édition (non, je ne jubile pas en écrivant ça) :

"Veuillez, écrivait-il, présenter mes devoirs au puriste qui lit vos épreuves et lui dire que j'écris une espèce de patois un peu comme la langue parlée par un maître d'hotel suisse, et que lorsque je semble faire des fautes de grammaire, nom de Dieu c'est exprès, et quand j'interromps le développement velouté de ma syntaxe plus ou moins élégante avec un mot ou deux de l'argot des bars, je fais ça avec les yeux grands ouverts, l'esprit tranquille mais sur le qui-vive. La méthode n'est peut-être pas parfaite, mais je n'ai pas mieux. Je trouve que votre correcteur est bien gentil de vouloir me remettre dans le droit chemin, et je lui suis bien reconnaissant, mais je crois être capable de me diriger tout seul, à condition d'avoir les deux trottoirs et la chaussée à moi."

Vous comprenez, j'en suis sûre, pourquoi je me détends beaucoup, ces temps-ci, à la lecture de Chandler...

Cet auteur dont la valeur n'est plus à prouver se battait contre les classifications littéraires, ce qui me parle en profondeur : je veux dire par-là qu'aujourd'hui, quand vous entrez dans une librairie, si vous cherchez le rayon fantastique par exemple (exemple tiré au hasard, bien sûr), vous avez le choix entre l'héroïc Fantasy (Tolkien, Robin Hobb et autres bons auteurs, mais qui n'appartiennent en rien à la définition historique du fantastique), de la science fiction (Ah, Frank Herbert...) et de l'horreur. Mais Edgar Poe, Balzac, Mary Shelley, tout ça, vous pouvez toujours chercher, vous les trouverez en littérature classique. Ce qui est bien, mais alors que fiche Stephen King sur l'étagère horrifique, dans ce placard où des couvertures noires et moches découragent les lecteurs émotifs, alors que c'est un écrivain, un vrai, et que nombre de ses livres épuiseraient plusieurs catégories à la fois ?

Et le polar, parlons-en, puisque Chandler en est un des maîtres incontestés. La peau de Chagrin est un polar, certains romans de Zola aussi. Sans parler du Nom de la Rose, ni prétendre épuiser la liste.

Mais non, l'étiquette polar, comme toutes ces étiquettes dont chacune est plus imbécile que l'autre, est réservée aux auteurs décrétés "mineurs", au nom d'un snobisme littéraire tellement stupide que je vais laisser Chandler vous en parler mieux que moi :

"Tous ces gens que l'on rencontre aujourd'hui, qui ont reçu une éducation et sont à demi-illétrés, me répètent tout le temps ce genre de choses : "Vous écrivez si bien que vous devriez vous mettre à un roman sérieux." Ils se croiraient sans doute insultés si on leur faisait remarquer que le fossé artistique entre un très bon roman policier et le meilleur roman sérieux de ces dix dernières années est à peine mesurable, comparé au fossé qui sépare ce roman sérieux d'une œuvre quelconque représentative de la littérature grecque au quatrième siècle avant Jésus Christ."


Voilà qui remet les choses bien à leur place, n'est-ce pas ?
Je ne résiste pas à vous faire lire la réponse qu'il envoya à son ami Erle Stanley Gardner, qui se plaignait d'écrire des nullités :

"... Je m'adresse maintenant à la Cour, à propos d'un certain Gardner, auteur de fictions policières. La masse des lecteurs est, en mettant les choses au mieux, adolescente... [...] Et il est évident que, puisqu'on a enseigné à lire de force à ce public, il voudra, entre deux tentatives pour ingérer le dernier best-seller "sérieux", lire des livres qui l'amusent ou le passionnent. Aussi [...] il s'adressera avec soulagement à celui qui raconte une histoire et rien d'autre. En conclure que ce que cet homme écrit ne saurait être de la littérature revient à dire qu'un livre ne peut être bon si vous avez envie de le lire.
Quand un livre, n'importe quelle espèce de livre, atteint un certain degré de réussite artistique, c'est de la littérature. Cette intensité peut être affaire de style, de situation, de caractère, de ton d'émotion, ou d'idée, ou d'une demi-douzaine d'autres choses. Cela peut également être une parfaite maîtrise du mouvement de l'histoire, comparable à la maîtrise qu'un grand joueur de base-ball a de la balle. C'est à mon avis la qualité que vous possédez plus que tout autre...
[...] Donc, plus de ces blagues du genre de "en tant que littérature, ce que je fais ne vaut pas un clou"."


Voilà qui devrait consoler bien des auteurs à succès vilipendés par la critique ( parce qu'il faut bien qu'elle s'amuse, et qu'il est toujours plus valorisant de tailler dans un auteur à coups de serpe que de dire son admiration pour quelqu'un, et que ce soit crédible sans être mièvre ou plat). Il y a toujours une raison au succès, et ce n'est pas forcément un "malentendu", comme certains voudraient le croire.

Enfonçant le clou, Chandler ajoute plus loin :

"Je crains que notre goût de la classification ne soit trop fort. Je crains que notre ignorance intellectuelle fondamentale ne soit trop grande. [...] J'admets que trop de romans policiers sont médiocres, mais si l'on est un peu difficile, il y a trop de livres médiocres dans tous les genres. Mais le plus mauvais d'entre nous s'arrache les tripes à chaque chapitre. Et à chaque nouveau livre, le meilleur d'entre nous repart à zéro.
[....] Il se trouve que je suis un des veinards, et, croyez-moi, il faut vraiment de la veine..."



Bon, on a parlé de choses sérieuses, là, mais je ne voudrais tout de même pas oublier l'humour ravageur de Chandler. Sa correspondance est truffée d'humour. Il reproche à certain auteur de ne s'être pas assez documenté sur les poisons et leurs antidotes, en profitant pour livrer le fruit de ses propres recherches... et je ne résiste pas au plaisir de vous citer certaines de ses Remarques sur le roman de mystère, écrites en 1949:

"1. La situation originale et le dénouement doivent avoir des motifs plausibles. On doit y trouver les actes plausibles de personnages plausibles dans une situation plausible, en se souvenant que la vraisemblance est en grande partie une question de style. Cela interdit la plupart des fins truquées, et ces histoires où l'on prétend "boucler la boucle", et dans lesquelles le personnage le moins probable se révèle être le criminel, sans pour autant convaincre personne. [...]

2. Il ne doit pas y avoir d'erreurs techniques sur les méthodes de meurtres et d'enquête. On ne doit pas utiliser de poisons fantastiques ou se tromper sur la dose mortelle etc. On ne doit pas mettre de silencieux sur un révolver (parce que ça ne marcherait pas, puisqu'il y a discontinuité entre le canon et le barillet), on ne doit pas voir de serpents grimpant à des cordons de sonnette. [...]

5. Le dénouement idéal, c'est celui où tout s'éclaire au cours d'une scène fulgurante. D'autres bonnes idées sont toujours rares, et un écrivain qui réussit cela mérite d'être félicité. Il n'est pas nécessaire que l'explication soit courte, et c'est souvent impossible. Ce qui importe, c'est que cette explication soit intéressante en elle-même, quelque chose que le lecteur attend avec impatience, et non pas une nouvelle histoire avec tout un groupe de personnages nouveaux ou méconnaissables, entraînés là pour justifier une intrigue qui fait eau. [..]

6. [...] Cela flatte la vanité du lecteur d'avoir un peu éclairci le brouillard. L'important, c'est qu'il reste un peu de brouillard à la fin, pour que l'auteur puisse le disperser. [...]

9. Il faut que d'une façon ou d'une autre le criminel soit puni, pas forcément par un tribunal. Contrairement à la croyance populaire, cela n'a rien à voir avec la moralité. Cela fait seulement partie de la logique du genre. C'est comme une dissonnance qui irrite."



Et il ajoute, le rusé personnage : "l'amour affaiblit presque toujours un roman policier, car cela introduit une sorte de suspense contraire à la lutte du détective pour résoudre le problème. Cela truque les cartes, et neuf fois sur dix, au moins deux suspects inutiles sont éliminés. La seule forme d'amour efficace est celle qui ajoute un élément de rique personnel pour le détective. Mais en même temps, on sent instinctivement qu'il ne s'agit que d'un simple épisode. Un bon détective ne se marie jamais."





Pour terminer en beauté, quelques morceaux choisis de ses romans, quand même ! Afin que ceux qui ne le connaissent pas encore rencontrent Philippe Marlowe, et puissent savourer cette "magie" de l'écriture chandlerienne que seule Boris Vian a su approcher, car c'était un poète et un musicien ayant l'attention et l'amour requis pour entendre et traduire la musique de l'autre. J'ai beaucoup cité la correspondance de Chandler, parce qu'elle le méritait et qu'on ne la trouve plus en librairie... pour les romans, je ne vais vous offrir que de courts extraits, tous traduits par Boris Vian, histoire de vous allécher et d'allonger votre LAL....

Les premiers extraits sont tirés de la Dame du Lac, publié en 1943 :












"Je lui fis un sourire méchant. La petite blonde dressa l'oreille, un petit coquillage rose, et sourit, d'un sourire doux comme un duvet. Elle paraissait enjouée et empressée, mais pas très sûre d'elle. Tout à fait le petit chat débarquant dans une maison où l'on se fout éperdument des petits chats."



"Les minutes défilaient sur la pointe des pieds, un doigt sur les lèvres. J'avais beau examiner l'endroit : on ne pouvait rien en dire."



"Même en faisant tous mes efforts pour être gentil, je finis toujours le nez dans la mélasse et le pouce dans l'œil de quelqu'un."


"M. Grayson était un long bonhomme voûté au visage jaune, avec des épaules en porte-manteau, des sourcils hérissés et presque pas de menton. Le haut de sa figure parlait affaires et le bas fichait le camp. Il portait des lunettes à double-foyer et il grignotait d'un air maussade les dernières nouvelles du soir."


"Nous atteignîmes la longue montée de San Dimas qui mène jusqu'à une crête et redescend sur Pomona. C'est la limite des brouillards et le commencement d'une région à moitié désertique où le soleil est sec et léger comme du vieux porto, le matin, aussi chaud qu'un haut-fourneau à midi et s'effondre comme un type en colère au crépuscule."



"Doucement, Degarmo me demanda :

— Mon vieux, comment vous êtes-vous arrangé pour vivre aussi longtemps ?

Je répondis :

— En ne gobant pas toutes les blagues et en ne me laissant pas trop impressionner par les durs professionnels."


Mon dernier choix livresque du jour sera le Grand Sommeil.

Une anecdote est restée fameuse à son sujet : lors de son adaptation au cinéma, Humphrey Bogart, qui jouait Marlowe, demanda à Chandler "qui avait fait le coup, finalement", parce que cette question le travaillait depuis le début du tournage. L'écrivain lui rétorqua qu'il n'en avait aucune idée...

Alors que Marlowe rend visite au vieux général Sternwood, à demi-paralysé, le détective l'interroge sur ses deux filles :

"— Dois-je rester poli ? demandai-je. Ou puis-je simplement me montrer naturel ?

— Je n'ai pas remarqué que vous souffriez d'aucune inhibition, monsieur Marlowe.

— Vos deux filles ont-elles l'habitude d'être ensemble ?

— Je crois que non. J'ai l'impression qu'elles vont à leur perte, séparément, par des routes légèrement divergentes. Vivian est gâtée, exigeante, intelligente et parfaitement impitoyable. Carmen est une enfant qui aime arracher les ailes aux mouches. Ni l'une ni l'autre n'ont plus de sens moral qu'une chatte."


Et le vieux général d'ajouter :

— "Si je vous semble un peu sinistre comme père, monsieur Marlowe, c'est parce que le lien qui me rattache à la vie est si frêle que je peux me permettre d'éviter l'hypocrisie victorienne.
[...] Je n'ai pas besoin d'ajouter que l'homme qui a la faiblesse de devenir père pour la première fois à l'âge de cinquante-quatre ans n'a que ce qu'il mérite."


Allez, deux petites dernières, pour finir en beauté : la première tirée toujours du Grand Sommeil, la seconde... de The king in yellow :


« Les cadavres sont plus lourds que les coeurs brisés. »


« Je suis un buveur occasionnel, le genre de type qui sort boire une bière et qui se réveille à Singapour avec une barbe. »


Ici, parlait-il de Marlowe, qui a une bonne descente, ou de lui, plutôt?... Je penche pour la deuxième solution, mais avec ce pince-sans rire, allez savoir !



Dans la préface à sa correspondance, j'apprends que Raymond Chandler, ce grand sentimental à l'humour féroce, mourut à soixante-huit ans, "de fatigue, de vieillesse, de pneumonie, d'alcoolisme, de solitude et d'abandon."

Gilles Deleuze disait que certains écrivains, en particuliers les auteurs américains, épuisent leur propre existence en se tuant à la tâche, pour ainsi dire. Parce que leur lucidité et leur sensibilité au monde ont un prix. Parce qu'il faut bien quelques cigarettes, quelques verres d'alcool fort pour éponger tant de chagrins et survivre à ce métier bizarre où l'on se "saigne à blanc" à chaque chapitre.
D'ailleurs, ce n'est pas vrai des seuls écrivains, mais de beaucoup d'artistes. En témoigne ce film magnifique de Bertrand Tavernier, Autour de Minuit, où un l'admirateur éperdu d'un jazzman (superbement incarné par François Cluzet) tente de sauver son idole d'une fuite éperdue à travers l'alcool et la drogue, refusant d'admettre que cette auto-démolition est la seule béquille qui lui permet d'aller chercher, jusqu'au bout, sa musique.



Mais aujourd'hui, quand on lit Chandler, on ne voit plus la souffrance qui sous-tend la fluidité du texte. On ne voit ni le chagrin ni la solitude, seulement l'humour, la clairvoyance, l'élégance du désenchantement, et une bouffée d'amour qui vous prend par surprise, comme ça, entre deux coups de feu.

Et je vais vous laisser sur ces mots de lui, parce qu'ils ont toute leur place ici et que je pourrais les dédier à beaucoup d'entre vous, écrivains en devenir ou déjà accomplis... j'aime particulièrement ces mots parce que je ne crois pas, et n'ai jamais crû, à la rivalité entre les artistes. Si elle existe trop souvent, elle n'est que le fruit de la petitesse et de la fragilité de l'homme, qui place sa vanité là où elle n'a aucun sens, et fait d'une émulation (où les artistes se nourrissent naturellement les uns les autres) une compétition ridicule :

« Toute personne capable d’écrire une page de prose vivante ajoute quelque chose à nos vies, et celui qui le peut, comme moi, est certainement le dernier à s'offenser de rencontrer un autre écrivain qui peut faire encore mieux. [...] Si vous croyez à un idéal, vous ne le possédez pas, c'est lui qui vous tient, et vous ne voudrez certainement pas l'arrêter à vos propres limites pour des motifs commerciaux. »

Voilà, c'est tout pour aujourd'hui. J'espère que tout ça vous a donné envie de lire Chandler, ou d'écrire, pourquoi pas, des "romans de mystères" ?

A bientôt, et bon week-end à tous !

Gaëlle

12 octobre 2006

Réponse à l'invitation de Choupynette

Bonjour à tous !

Je suis donc sortie du couvent, et comme Choupynette m'a invitée à répondre au questionnaire d'Agapanthe, je m'y colle...

Mais je voulais vous préciser une chose ou deux : en principe, ce café n'est pas censé parler de moi mais des autres, les vrais grands auteurs, les cinéastes talentueux, tout ça. Or depuis ma retraite j'ai dû vous dévoiler le début de ma petite carrière d'écrivaillonne, histoire de me faire pardonner de vous lâcher si près des vacances. Mais maintenant, on va recommencer à parler des grands romanciers, si vous êtes d'accord. C'est juste que comme j'ai pas mal de boulot en ce moment en dehors de mon petit café, et que Choupynette m'a si gentiment proposé son questionnaire, je m'y colle. Mais dès la semaine prochaine, j'espère trouver mieux à vous mettre sous la dent !

Maintenant que j'ai reprécisé mes objectifs, en piste pour le questionnaire :


1)Attrapez le livre le plus proche, allez à la page 18 et écrivez la 4ème ligne:


"Et un cercueil est plus valorisant qu'un bébé aux yeux des autres enfants ; cela confère une once de prestige"...Si vous voulez savoir le fin mot de cette énigme sybilline, rendez-vous dans la plus proche librairie pour vous procurer "le Petit Oiseau blanc" de James Matthew Barrie, l'auteur de Peter Pan, traduit par miss Holly Golightly. Ces mots font partie de la superbe préface qu'elle a écrite pour ce livre, dont je reparlerai sûrement ici quand je l'aurai fini !


2)Sans vérifier, quelle heure est-il?

11h

3)Vérifiez:

11h20 ! En voilà une question intéressante : maintenant je comprends pourquoi il m'arrive d'être en retard chez le dentiste. J'ai un sens approximatif de l'heure, sans compter mon sens de l'orientation, totalement défaillant.

4)Que portez-vous?

Ce questionnaire a été composé par un homme, non ?...un jean, un tee-shirt vert olive, une veste violette et un pendentif violet. Ah, et des chaussettes chaudes, car l'été est derrière nous, ma bonne dame !

5)Avant de répondre à ce questionnaire, que regardiez-vous ?

Les centaines de pages de mon manuscrit à réécrire, ne sachant par quel bout le prendre. Ce qui fait que prise de vertige, j'ai préféré répondre à ce questionnaire.

6)Quel bruit entendez-vous à part celui de l'ordinateur ?
La bande son des Aristochats, le film favori de ma fille, dont je connais à présent par cœur chacune des répliques.
J'ai essayé de proposer une variante Belle et le Clochard, mais ça n'a pas marché. Rien ne remplace le jazz de Scat Cat et le charme d'O'Malley. Du coup j'ai toute la journée dans la tête : "A jouer du jazz on devient vite un acrobate... mais tout le monde veut devenir un cat..." ce qui est toujours mieux que le générique des Télétubbies, croyez-moi.

7)Quand êtes-vous sortie la dernière fois, qu'avez-vous fait ?

Je suis allée acheter un livre, comme si je n'en avais pas déjà assez dans ma PAL ! Mais comment résister à un roman de Jack London qui porte le titre alléchant du "Bureau des assassinats" ? Je suis faible, je sais. Mais la PAL d'Holly m'a trop décomplexée.

8)Avez-vous rêvé cette nuit ?

Je rêve toutes les nuits, essentiellement des cauchemars, on s'y fait, si si... mais là c'était un rêve sympathique, pour changer... on se serait crû dans un film de Jane Austen avec moi en héroïne. Je voudrais bien qu'il devienne récurrent, ce rêve, mais la statistique est contre moi.

9)Quand avez-vous ri la dernière fois ?

Ce matin, en me rappelant une réplique que m'a servie un de mes éditeurs (ils sont frères, voilà pourquoi j'en ai plusieurs) dans mon couvent : "Toi, si tu n'écrivais pas, tu serais folle, je pense". j'ai trouvé ça immédiatement très flatteur, vu que ça me mettait dans la même catégorie que Stephen King... Ensuite j'ai pris un fou-rire, juste avant de me demander ce qui, dans mon roman, lui avait donné ce sentiment ! Depuis, ça reste un moment drôle.

10)Qu'y a t'il sur les murs de la pièce où vous êtes?

Mon bureau est couvert de livres, il y a aussi des gravures de La Divine Comédie de Dante par Gustave Doré, des cartes postales de l'Adèle Blanc Sec de Tardi (j'adore), un grand tableau breton...

11)Si vous deveniez multimillionnaire dans la nuit, quelle est la première chose que vous achèteriez ?

Je dévaliserais le centre ville de Lyon à commencer par les librairies, vendeurs de DVDS, quelques boutiques de fringues histoire de m'offrir une tenue un peu plus affriolante et de faire quelques cadeaux vestimentaires à mon homme, un ou deux magasins de jouets (non pas que ma fille en manque)... je penserais probablement à acheter un appartement introuvable en centre ville avec terrasse cachée sur un toit et assez grand pour y planquer tous mes nouveaux achats... J'achèterais illico l'intégrale de la Saison Oz aux Etats-Unis, celle de Twin Peaks... bref j'ai plein d'idées. Voilà pourquoi je ne joue jamais au loto, car ça me scierait le moral de ne jamais gagner!

12)Quel est le dernier film que vous ayez vu ?

Le monde selon Garp. Pas aussi bien que le livre, qui fait partie de ma liste fétiche... mais quand même un bon film !

13)Avez-vous vu quelque chose d'étrange aujourd'hui ?

Ma fille m'a dit "les boules !", mot que nous ne prononçons JAMAIS en sa présence, et qu'elle a employé avec beaucoup d'à propos. Elle a 2 ans. Ce n'était pas seulement étrange, c'était inquiétant. Comprenez-moi.

14)Que pensez-vous de ce questionnaire ?

Franchement ? Que c'est un très bon moyen de s'empêcher de travailler. Bien plus sympa que de faire le ménage, par exemple, ou de se culpabiliser bêtement.

15)Dites-nous quelque chose de vous que ne savons pas encore :

Quand j'étais enfant, la raison en reste mystérieuse, j'avais une peur panique d'avoir une Apparition. Parce qu'après, on sait bien que les ennuis commencent, et je n'avais aucune envie de finir tuberculeuse au Carmel, ou tabassée par le Diable dans un bled paumé de la Galaure. Depuis ça m'a passé, mais j'ai gardé une grande méfiance envers les Apparitions, et j'évite si possible de passer par Lourdes.

16)Quel serait le prénom de votre enfant si c'était une fille ?

Je tenterais bien Scout-La-Rue, Apple, Coco ou Shiloh-Nouvel, juste pour voir si elle a l'instinct de survie chevillé au corps.

17)Quel serait le prénom de votre enfant si c'était un garçon ?

Judas ou Jesus, pour la raison précédemment citée au sujet de la petite fille. Soyons égalitaires !

18)Avez-vous déjà pensé à vivre à l'étranger ?

Oui, à Prague quand j'étais étudiante, mais j'ai très peur de la solitude de l'individu dépeuplé. Je suis casanière et j'ai l'esprit caravane. Donc si tout le monde ne veut pas venir habiter avec moi en Angleterre, à New York (encore que de nos jours, je ne suis pas sûre que ça soit si sympa), en Toscane... je préfère rester chez moi !


19)Que voudriez-vous que Dieu vous dise lorsque vous franchirez les portes du paradis ?

"Tu vois, j'ai exaucé ton vœu, rassure-toi, tu es très loin d'être une sainte !"

20)Si vous pouviez changer quelque chose dans le monde en dehors de la culpabilité et la politique, que changeriez-vous ?

L'incapacité de l'individu moyen à se mettre dans la peau de son voisin, ne serait-ce que quelques minutes, de temps en temps.


21)Aimez-vous danser ?

J'aime beaucoup. Mais en fait mon rêve aurait été de savoir danser dans la troupe de Baryshnikov.

J'ai quelques ambitions rentrées, comme on voit. Hélas très vite il s'est avéré qu'il aurait fallu y songer dès ma conception, et me fabriquer autrement.



22)Georges Bush ?

Je pense toujours à lui comme au gouverneur du Texas qui a osé dire à la télé à propos d'une jeune femme sur le point d'être exécutée et en attente d'une hypothétique grâce : "I prayed to God, and he told me : she must die". Ce jour-là je me suis demandé quel genre de dieu il priait, ce gars.




23)Quelle est la dernière chose que vous ayez regardée à la télévision ? :

Les Experts, une série qui est un de mes péchés mignons : j'y ai appris, incidemment, qu'une jeune fille vierge pouvait devenir enceinte, "par frottement". Je n'ai pu m'empêcher de me demander si on avait transmis l'info au Vatican. Non parce que la théorie de la Vierge Marie en prend un sacré coup, mine de rien.


24)Quelles sont les 4 personnes qui doivent prendre le relais sur leur blog ?

La Trollette, Free, Lamousmé et Wictoria, si elles ne m'en veulent pas trop de leur refiler la patate chaude !!

Sur ce, bonne journée, mes petits. A très vite pour quelque chose d'un peu sérieux.

DERNIÈRE MINUTE : Wictoria ayant déjà répondu au questionnaire au mois d'avril (alibi incontournable)... je propose deux remplaçantes ex aequo : Nziem et Holly. Au cas où l'une d'elle l'aurait déjà fait. Hé hé.

Gaëlle

PS : si vous voulez voir les réponses de mes petits camarades, outre Choupynette ça se passe chez Loupiote, chez Thom bientôt (paraît-il...), et chez Anne un de ces quatre (ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? Anne, je sais que tu es surbookée, mais ce questionnaire est tenace et va si bien te trotter dans la tête qu'un beau matin tu vas être obligée d'en finir et d'y répondre. J'en ai peur.)

7 octobre 2006

Concours de la plus grande PAL: LES RESULTATS!!

Bonjour à tous ! Gaëlle is back ! Et très heureuse de vous retrouver... hé hé.. ma pénitence de romancière est finie, même si elle avait bien des avantages... je dis ça mais dès la semaine prochaine un boulot d'arrache-pied m'attend : corrections et retouches en tout genre de mon manuscrit, à rendre fin novembre... je tâcherai quand même de venir vous poster quelques billets pour me changer les idées !

En attendant, les résultats tant attendus du concours organisé avec ma fidèle associée Loupiote :


En première position, Holly Golightly avec un score de 1500 : Grande Prêtresse cosmique de l'Ordre de la PAL. Si vous ne vous rappelez plus du titre d'un bouquin épuisé, il y a de grandes chances qu'il soit chez elle. A sa décharge : elle a épousé un homme ET sa bibliothèque. Voilà une astuce à retenir pour les livrophages encore célibataires...

En deuxième position, Lamousmé avec un score de 826, Première dauphine de l'ordre de la PAL : mérite toute notre admiration aussi, et devrait réclamer des bons d'achat chez son libraire favori.

En troisième position Allie, avec une PAL impressionnante de 581
, deuxième dauphine, qui non seulement s'apprête à tout lire mais aussi à nous donner envie d'accroître drastiquement notre PAL, ce qui est fort généreux, même si ça ne va pas nous aider à guérir de nos frénésies d'entassement.


En quatrième position Virginie avec une PAL confortable de 442, (de quoi passer pas mal de soirées d'hiver au chaud !), notre troisième dauphine, encore une courageuse qui nous permet de nous sentir moins atteints, même si au fond de nous, nous savons que de 99 (et oui Doune!) à 1500, le même virus galopant est à l'œuvre en nous, à peine tempéré par quelques contraintes budgétaires.


En cinquième position Bouquinette avec un score très respectable 424 : notre dernière dauphine, Sophie l'a échappée belle ainsi que pas mal d'autres... Mais avec un nom pareil, forcément, comment ne pas rejoindre le quintette gagnant ?


Les autres participant(e)s, qui n'ont pas gagné mais tout est relatif car ils et elles ont quand même de quoi lire pour les trois prochaines années, à vue de nez :

6 Sophie avec un score de 400
7 Valeriane avec un score de 372
8 Mélanie avec un score de365
9 Yogi avec un score de 338
10 Laurence avec un score de 304
11 Gaëlle avec un score de 291
12 Eirean yvon avec un score de 200
13 Michel avec un score de 196
14 Laure avec un score de 187
15 Choupynette avec un score de 165
16 Loupiote avec un score de 160
16 Frisette avec un score de 160
18 Charlotte avec un score de 149

19 Hervé avec un score de 146
20 Clarabel avec un score de 136
21 Meidosemme avec un score de 133
22 Majanissa avec un score de 130
23 Iokanaan avec un score de 120
24 Véro avec un score de 113
24 Elfe avec un score de 113
25 Doune avec un score de 99
26 Papillon avec un score de 89
27 Anne avec un score de 69
28 May avec un score de 68
29 Solenn avec un score de 51
30 Chimère avec un score de 49
31 Florinette avec un score de 47

Ceux et celles qui ont des PAL raisonnables, ou qui sont déjà passé(e)s par la cure de désintoxication ou le bilan intime et ont repris le droit chemin ...


32 Lily avec un score de 43
33 Joël avec un score de 31
34 Gene avec un score de 29
35 Jo Ann avec un score de 28
36 Brillantine avec un score de 28
37 Wictoria avec un score de 25
38 Cathy avec un score de 23
39 Samantdi et Clochette ex aequo avec un score de 13
40 Freefounette avec un score de 12
41 Sylire et Jean louis ex aequo avec un score de 10
43 NZiem, Mariel et la Trollette ex aequo : 6 ! (bravo les filles !!)


52 ex aequo, ceux et celles qui ont des PAL ultra respectables (ou qui n'ont pas transmis assez précisément leurs résultats) qui nous font honte à tous, ou qui lisent tout ce qu'ils achètent ou empruntent au fur et à mesure, ce qui nous fait encore plus honte : Anitta, Philippe, Dr Orlof, Cathulu, Cécile, Gaspard, Antony, Tamara, Zerbinette, Thom, Slumblogger, Miss Poivert (il me semble que tu devrais figurer plus haut mais Tubinap, qui a fait les comptes, a peut-être égaré ton score ??), Mariaba (idem pour toi... c'est louche...), Lisa (je vais quand même vérifier... n'aurais-tu pas donné ton chiffre dans un billet précédent ?), Kalistina, Anne-Sophie...

Si j'en ai oublié(e)s, pardonnez-moi, je suis un peu crevée de mon séjour en soins littéraires intensifs. Sans compter tous ceux et celles qui ont laissé leurs scores sur d'autres blogs que celui de Loupiote ou le mien, nous n'avons pas pu aller voir partout, c'était déjà du boulot de comptabiliser de chez nous. Mais nous nous excusons si nous avons oublié une gagnante sur une autre galaxie littéraire !

A très bientôt et bon week-end à tous. Que celles qui ont gagné soient absoutes derechef, sinon enviées (je visiterais bien vos bibliothèques moi !)... et que les "perdants" se réjouissent ou se rassurent, nous allons faire notre possible pour faire monter un peu vos PAL dans les mois à venir.


Bises

Gaëlle

N.B. : Crédit photos : CIO, musée Olympique