7 septembre 2006

Vous reprendrez bien une pincée d'humour victorien ?

Bonjour à tous !

Je sais, j'avais pris des bonnes résolutions... et j'ai un peu traîné en route. Mais c'est qu'il faut en lire, des livres, et en regarder, des films, pour venir vous en parler ensuite. Non pas que je m'en plaigne. J'adore ça. Simplement, je voulais vous parler de Saki, un écrivain anglais de la fin du XIXème siècle, et je ne voulais pas le faire n'importe comment. Et même là, après avoir lu quatre recueils de nouvelles de ce grand homme, en éclatant de rire environ tous les six lignes car son humour est irrésistible de finesse et de pince sans rire, j'ai un peu le trac, au moment de vous le présenter. Parce que depuis un certain temps, les habitués de mon café ont remarqué que j'ai un gros faible pour les auteurs victoriens. Et ce gros faible, j'aimerais qu'il soit contagieux. Une vraie pandémie. N'ayons pas peur des mots ! Je sais qu'on associe souvent aujourd'hui l'adjectif "victorien" avec "lectures assommantes, remplies de dames qui prennent le thé en comparant la taille de leurs ourlets et en échangeant les derniers potins, de gentlemen qui se battent en duel pour des motifs contestables, d'histoires d'amour languissantes et d'enfants en guenilles agonisant dans une ruelle noire." Je sais. Mais on se trompe. Ce qui n'est pas grave en soi. Le préjugé vient souvent du fait qu'on n'a pas lu ces livres "victoriens", qu'on les pense à tort tous pareils et rébarbatifs au possible, et que si on en a lu des morceaux, c'était au plus mauvais moment de la vie : sur le banc d'une classe. A une époque où les cancans de l'école et nos propres histoires d'amour étaient à peu près les seules choses susceptibles de nous intéresser.
Aussi, quand j'arrive avec dans mes bagages un auteur victorien, je tremble, car je sais que ce seul adjectif va faire fuir bon nombre d'entre vous, que je voudrais retenir quelques minutes par le col. Juste le temps d'éclaircir quelques malentendus:

1. Je ne suis pas de ces lectrices impavides qui ne peuvent être assommées par une lecture. Je suis fréquemment jetée hors d'un livre par un ennui irrépressible. Je bâille souvent, il m'est arrivé d'utiliser certains romans en guise de somnifères. Je n'ai pas honte de le dire, c'est moins dangereux pour l'organisme. Je peine à la simple idée de lire l'œuvre de Proust d'une seule traite. D'ailleurs à ce jour je n'ai pas eu ce courage. Je reconnais (sans mérite) que c'est un génie de la littérature, mais toute "la Recherche du Temps perdu" d'un coup, ça je ne peux pas, cela m'est indigeste. Vous voyez, je vous fais une confidence de taille ! Je viens de me mettre à dos à peu près tous les universitaires lettrés qui se seraient égarés sur ce blog, sous toutes les latitudes. Tant pis. J'assume. Mais un livre d'aujourd'hui, un livre d'à peine deux cent pages, peut aussi me tomber littéralement des mains. Je vous l'assure. Tandis qu'un "pavé" comme La Rose pourpre et le Lys (dont Holly a fort bien parlé ici) ou, dans un autre style, comme Les Piliers de la terre, me paraît trop court dès la page dix. Tout ça pour vous dire que lorsqu'on a la chance d'ouvrir un vrai bon roman, on se moque bien de l'époque où il a été écrit, ou de son nombre de pages. On est happé et on rentre dedans avec une telle reconnaissance qu'en sortir est presque douloureux. Quand on le quitte, c'est à regret, le cœur lourd, doutant même de dénicher un jour un livre aussi profond, aussi captivant, qui parle aussi précisément à nos émotions, à nos blessures et à nos secrets les mieux enfouis.

2. Il n'y a pas UN style d'auteur victorien, mais une myriade de styles et d'écrivains, qui se trouvèrent rassemblés à cette époque en Angleterre, pays où sont nés des conteurs qui figurent parmi les plus brillants de tous les temps. Quelque chose de particulier et d'ensorcelé doit circuler dans l'air, sur cette île où l'on a inventé des histoires tellement extraordinaires qu'elles franchissent allégrement les siècles, sans lasser leur public. A commencer par les enfants, pourtant un lectorat des plus difficiles. Quelques exemples, pour le plaisir : Tolkien et son anneau fatal, A.S. Lewis et ses Chroniques de Narnia, James Matthew Barrie et son Peter Pan, Lewis Carrol et son Alice imprudente et délicieuse, J.K Rowlings et son si populaire Harry Potter... en France, depuis plus d'un siècle on nous serine que "LE ROMAN EST MORT". Ah bon. Ce doit être un coup du nuage de Tchernobyl, parce que partout ailleurs, il se porte à merveille, merci. En témoignent Jonathan Coe, Sarah Waters, Zadie Smith, Toni Morrisson, John Irving, Joyce Caroll Oates, Gabriel Garcia Marquez... on ne va pas faire une liste, on en aurait pour des semaines et ce serait barbant. Même en France, il reste des survivants, qui tiennent ferme au milieu de toutes ces épitaphes et de toutes ces déclarations à l'emporte-pièces, et racontent de vraies histoires qui ne sont même pas écrites avec les pieds. Si si. J'ai vérifié.

Mais pour en revenir au roman victorien, si vous aimez les histoires trépidantes, Mary Shelley, Daniel Defoe, Charles Dickens, Wilkie Collins et les sœurs Brontë, par exemple, vous en donneront largement pour votre argent. Si vous préférez la satire sociale, Oscar Wilde, Thackeray, Jane Austen et Saki vous feront passer des moments délicieux. Pour ne citer qu'eux ! Et si vous aimez le fantastique... De Henry James aux romans cités plus haut... vous n'aurez que l'embarras du choix. Et parce que je reste la petite lectrice enthousiaste que j'ai toujours été, j'aime d'amour les écrivains anglais.

Voilà. Maintenant que j'ai éclairci quelques petites choses, je vais vous présenter Saki, alias Hector Hugh Munro, né le 18 decembre 1870 en Birmanie, mort à la bataille de la Somme le 13 novembre 1916, après avoir crié : "Eteignez cette cigarette, nom de Dieu !"
Ceux qui connaissent quelque chose à la guerre de 14, ou aux guerres en général, saisiront l'ironie macabre de cette dernière réplique, qu'on croirait tirée d'une de ses nouvelles.
Saki est donc un pseudonyme. Peut-être même emprunté au singe du même nom, ce n'est pas impossible, quand on connaît l'esprit malicieux et caustique de ce gentleman. Les gens pointus disent qu'il l'a emprunté à un vers des "Rumbayat". Je ne suis pas pointue, je ne connais pas la référence, mais je sais l'intérêt de Saki pour les bêtes, et particulièrement pour les animaux qui tournent les hommes en dérision et leur jouent des tours, or le singe, dans la tradition littéraire, a un don inné pour les farces et attrapes. Comme les deux personnages clés des nouvelles de Saki, Clovis et Reginald, deux mauvais garçons qui sont le poil à gratter de la bonne société victorienne, le cauchemar des duchesses et des snobs, la tempête qui s'abat sans crier gare sur les week-ends à la campagne de la gentry, renversant les tables à bridge et exposant au grand jour les ridicules et les secrets gênants des puissants. Je pourrais vous parler de Saki comme d'un trublion très intelligent, caustique à l'extrême, qui ne pardonne rien aux gens bien nés qu'il fréquente... mais il n'est pas que ça. Il y a derrière le satiriste un personnage blessé dont l'enfance reste plantée comme une écharde, et on ne peut pas l'écarter. Il parle comme personne des enfants punis, de ces parias élevés par des tantes tyranniques (ce qui fut son cas), réduits à des visages relégués derrière une vitre, à des présences rebelles et silencieuses attendant que sonne l'heure de la révolte ouverte. C'est pourquoi, avant de vous faire rire avec quelques morceaux choisis de Saki, je vais laisser la parole à un autre écrivain majeur, Graham Greene :

"Certains écrivains, aussi dissemblables que Dickens et Kipling, ne se délivrent jamais du fardeau de leur enfance. Abandonnés par leurs parents, Dickens à la fabrique de cirage, Kipling à la cruelle tante Rosa et à la banlieue poussiéreuse qu'elle habitait, ils en gardèrent toujours le souvenir. [...] La vie qui, chez la plupart d'entre nous, révèle son côté cruel à un âge où nous commençons à connaître l'art de nous défendre, a surpris ces deux écrivains à l'époque désarmée de la petite enfance. Comme ils ont réagi de manière différente ! Dickens a appris la sympathie, Kipling la cruauté. Dickens a graduellement acquis un style si aisé, si naturel qu'il semble capable d'englober l'humanité entière ; Kipling a inventé, pour l'exclure, une machine dont les rouages fonctionnent à la perfection. Ses personnages ont parfois l'air de descendre avec un bruit sec le long d'une courroie de transmission comme une série de boîtes d'allumettes.
Il y a beaucoup de ressemblance entre les jeunes années de Kipling et celles de Saki, et Saki réagit à la souffrance comme Kipling plutôt que comme Dickens.[...]... quatre années d'absence de tendresse peuvent paraître au cours de l'enfance aussi longues qu'une génération (à quatre ans on est un bébé, à huit ans un petit garçon). Kipling a décrit l'horreur de cette brisure dans Baa, Baa, Black Sheep, nouvelle qui, en dépit de sa sensiblerie, est presque intolérablement pénible : les prières de tante Rosa, les châtiments corporels, la pancarte MENTEUR épinglée dans la dos, la cécité devenant peu à peu totale par manque de soins, avant que sonne enfin l'heure de la révolte.
"Si vous me forcez à faire cela, dit très calmement Black Sheep, je brûlerai cette maison jusqu'au sol et peut-être que je vous tuerai. Je ne sais pas si je peux vous tuer, vous êtes tellement osseuse... mais j'essaierai.""


Saki ne fut pas élevée par l'odieuse tante Rosa, mais par deux tantes qui se disputaient sans cesse et maltraitaient les pauvres gosses qui leur avaient été confiés : tante Charlotte et tante Augusta. Une des plus belles histoires de Saki, Sredni Vashtar, conte l'histoire de Conradin, petit garçon tyrannisé par sa tante, une veille fille sadique et aigrie, dont il se vengera sans scrupule aucun... Mais redonnons la parole à Graham Greene :

"Le malheur est un merveilleux aide-mémoire, et toutes les meilleures nouvelles de Munro sont inspirées par l'enfance, l'humour et l'anarchie, autant que par la cruauté et la misère de l'enfance.
Car la réaction de Munro à l'épreuve de ces années n'est pas absolument celle de Kipling. Lui aussi s'est fabriqué un style qui est comme une machine destinée à sa propre protection, mais quelles étincelles en jaillissent ! Il ne s'abritait pas comme Kipling derrière la virilité, la haute sagesse, les aventures imaginaires des soldats et des bâtisseurs d'empires ; il se protégeait à l'aide d'épigrammes aussi serrées l'une près de l'autre que les raisins secs dans un gâteau de Dundee à la mode d'autrefois.[...] Réginald et Clovis sont des enfants de Wilde : c'est entre eux un incessant feu croisé d'épigrammes et d'absurditéss qui nous éblouissent et nous enchantent mais derrière lesquelles nous sentons la présence d'un esprit plus dur, moins bienveillant que Wilde. [...]... ils se hâtent de blesser avant qu'on puisse les blesser, et leurs appartés spirituels et dévastateurs sont aussi cinglants que la badine de Tante Augusta. Et ces récits sont souvent des récits de farces et attrapes. Leurs victimes aux noms bizarres sont assez sottes pour n'éveiller aucune sympathie. Ce sont des gens d'âge mûr, des gens puissants ; il est juste qu'ils subissent une humiliation passagère parce que, à la longue, ils ont toujours le monde de leur côté. Munro, tel un chevaleresque bandit de grand chemin, ne dépouille que les riches ; il y a derrière toutes ces histoires un sens de la justice rigoureux."


Il y a donc de multiples façons de survivre à une enfance malheureuse, pour un écrivain, et j'espère que les mots de Graham Greene vous auront donné envie de découvrir non seulement Saki, alias Munro, mais aussi Oscar Wilde, Dickens et Kipling! (Et hop, voyez comme je vous appâte, l'air de rien...)

Bon, passons à Saki. Mais d'abord, qu'est-ce que c'est qu'une épigramme? Je sens bien que ce mot vient de faire fuir 35 % d'entre vous. Je l'ai senti tout de suite, mais je ne pouvais quand même pas couper la chique à Graham Greene ! Une épigramme, donc, est "un trait satirique, un mot spirituel et mordant". Voilà, vous pouvez maintenant briller en société. Vous pouvez même affirmer, dans la foulée, qu'Oscar Wilde, Jane Austen (si si) et Saki sont orfèvres en la matière, et donner comme exemple une épigramme de Saki :

"Ne soyez jamais un pionnier. C'est au Premier Chrétien qu'échoue le plus gros lion."
Avouez que ça en jette plus que les "petites phrases" des hommes politiques... vous savez, celles qu'ils jettent négligemment aux journalistes comme s'ils étaient des poules ? Quel manque de respect, tout de même.


A présent, il est temps de vous offrir un extrait plus conséquent. Je vous sens affamés. Je n'ai que l'embarras du choix, mais j'ai élu une nouvelle qui s'appelle "Tobermory". Voilà le contexte : Nous sommes fin août, c'est un après-midi "pluvieux et froid" à la campagne, une assemblée de gens très respectables est réunie dans un château, et comme le voulait la coutûme, on a invité quelques "invités surprise" qui ont pour but de distraire l'auditoire, par quelque talent, en cas de pluie. Un peu méprisant, me direz-vous. Lesdits invités n'étaient pas toujours dupes, mais n'avaient guère le choix, qu'ils fûssent sans le sou ou désespérément en manque de "relations", ou les deux à la fois... on a les amis qu'on peut se permettre ! Bref, ici, c'est un certain Mr. Cornelius Appin qui est censé jouer le rôle de fou du roi, mais il est bien mystérieux, et Lady Blemley, l'hôtesse, l'a invité sur la rumeur d'un "talent particulier", lequel est tout aussi mystérieux :

"... jusqu'à l'heure du thé ce jour-là, elle n'avait pu encore découvrir dans quelle direction ces dons, s'ils existaient vraiment, se déployaient. Il n'était ni un bel esprit ni un champion de croquet, il n'était pas un hypnotiseur hors pair pas plus qu'un acteur de théâtre amateur. Son apparence extérieure ne laissait pas davantage deviner le genre d'homme à qui les femmes sont prêtes à pardonner dans une large mesure leurs déficiences mentales."

Suspense insoutenable, qui se termine brutalement, parce que l'heure tourne et les convives s'ennuient ferme. Mr Appin est prié de dévoiler son talent. Il explique qu'il peut apprendre l'anglais aux animaux. On ne le croit naturellement pas. Il ajoute qu'il s'est livré avec succès à cette expérience sur le chat de la maison, Tobermory, lequel s'est révélé un sujet formidablement doué, "un surchat". On fait venir le chat au salon sur le champ, plus pour ridiculiser l'invité que pour vérifier ses dires. Sir Wilfrid va chercher Tobermory, et revient le visage pâle, car le chat parle bel et bien anglais. S'ensuit la scène suivante : il faut imaginer toute une assemblée autour de la table à thé, et le chat au centre, nonchalamment installé.

" Un silence fait de gêne et de contrainte tomba aussitôt sur l'assistance. Chacun semblait trouver contrariant au fond de s'adresser sur un pied d'égalité à un chat domestique dont les capacités mentales ne faisaient plus de doute.

"Veux-tu un peu de lait, Tobermory ? demanda Laudy Blemley d'une voix un peu crispée.
"— Volontiers", répondit le chat, d'un ton tinté de la plus parfaite indifférence. Un frisson mal réprimé d'excitation parcourut l'auditoire, et l'on comprend que Lady Blemley fît tomber un peu de lait en emplissant la soucoupe d'une main légèrement tremblante.

"Je crois bien que j'en ai renversé la plus grande partie, fit-elle d'un ton d'excuse."
— Bah, fit Tobermory, ce n'est pas mon tapis de haute laine."

Le silence s'appesantit de nouveau sur l'assistance, puis Miss Resker demanda de son ton le plus convaincu d'assistante sociale si le langage humain avait été difficile à apprendre. Tobermory la regarda un moment droit dans les yeux, puis son regard se perdit dans le lointain tandis que son visage arborait une expression d'absolue sérénité. De toute évidence, il n'était pas disposé à répondre aux questions oiseuses.

"Que pensez-vous de l'intelligence humaine ? demanda lamentablement Mavis Pellington.
— De quelle intelligence en particulier ? demanda Tobermory, glacial.
— Oh, de la mienne, par exemple, fit Mavis, avec un petit rire.

— Vous me mettez dans une situation embarrassante, dit Tobermory, dont le ton, pas plus que l'attitude, ne trahissait le moindre embarras. Quand il a été question de vous inviter pour le week-end, Sir Wilfrid a protesté en disant que vosu étiez la femme la plus écervelée qu'il connût ; il a dit qu'une distinction s'imposait entre l'hospitalité et l'assistance aux faibles d'esprit. Lady Blemley a répliqué que votre manque d'intelligence était justement la raison qui motivait cette invitation, car vous étiez la seule personne qui lui parût assez idiote pour acheter leur vieille voiture. Vous savez, celle qu'ils appellent "Le Rêve de Sisyphe", parce qu'elle monte gentiment les côtes si on la pousse."

Les protestations de Lady Blemley auraient eu un accent plus convaincant si elle n'avait pas négligemment laissé entendre à Mavis le matin même que la voiture en question serait exactement ce qui lui conviendrait pour sa maison du Devonshire.
Le major Barfield se lança, afin de tenter une diversion :

"Comment marche votre aventure avec la petite chatte tigrée de l'écurie, hein ?"

Dès l'instant où il eut posé cette question, tout le monde se rendit compte qu'il avait gaffé.

"On ne discute généralement pas ces questions en public, déclara Tobermory, glacial. D'après le peu que j'ai pu observer de vos façons depuis que vous êtes dans cette maison, j'imagine que vous trouveriez fort gênant de m'entendre évoquer vos propres ébats."

La panique qui s'ensuivit ne frappa pas que le major.

"Voudrais-tu aller voir si la cuisinière a préparé ton dîner, suggéra Lady Blemley précipitamment, en affectant d'ignorer que deux bonnes heures devaient encore s'écouler avant le dîner de Tobermory.

— Merci, dit Tobermory, il est encore un peu tôt après mon thé. Je ne veux pas mourir d'indigestion.
— Les chats disposent de neuf vies, tu sais, dit Sir Wilfrid avec entrain.

— Peut-être, rétorqua Tobermory, mais ils n'ont qu'un foie.

— Adelaïde ! intervint Mrs Cornett, comptez-vous encourager ce chat à aller cancaner avec les domestiques ?"

La panique était maintenant générale. Un étroit balcon courait devant les fenêtres de la plupart des chambres du château, et l'on se souvint avec consternation que ç'avait toujours été la promenade favorité de Tobermory ; il pouvait de là observer les pigeons, et Dieu sait quoi encore."


Si vous voulez savoir ce qu'il advint de Tobermory, le "chat qui en savait trop" (Hitchcock adorait Saki, m'a appris Holly, je pense que cette histoire devait le séduire particulièrement !), lisez donc La fenêtre ouverte, un de ses recueils. Mais je vous les conseille TOUS. C'est un régal. Les histoires sont détonnantes. Vous y apprendrez tout de la guerre transgénérationnelle entre deux familles isolées dans le fin fond de la campagne anglaise, qui prit des allures de guerre de Troie, d'autant plus drôles si l'on considère ce qui mit le feu aux poudres... vous vous délecterez des mauvais tours de Clovis ou de Réginald, des dilemmes des gens de bonnes familles... Un exemple : telle dame très chic a deux ambitions : vendre un cheval teigneux et réputé invendable, et marier sa fille... sa fille se fiance enfin... au jeune-homme à qui la mère a réussi, en mentant effrontément, à vendre son cheval ! Autre dilemme : un couple brûle d'envie de se "rabibocher" avec un cousin, car depuis qu'il vient d'hériter une somme colosssale, il est devenu fréquentable. Hélas, il a un défaut gênant : la cleptomanie. Que faire ?

Une dernière chose : les nouvelles de Saki sont brèves comme des coups de sabre, elles peuvent se lire entre deux stations de métro et vous offriront le luxe de commencer une journée de travail par un éclat de rire. N'est-ce pas luxueux ?

Et maintenant, pour que le plaisir soit complet, une petite séance dvd victorienne :

D'abord un film léger et malin qui se laisse voir et revoir avec plaisir : Un mari Idéal, adaptation de la pièce d'Oscar Wilde par Oliver Parker, avec Cate Blanchett, Minnie Driver, Rupert Everett, Julianne Moore, Jeremy Northam...
Sir Robert Chiltern (Jeremy Northam) est un brillant politicien et gentleman accompli, il est de plus le mari parfait d'une épouse non seulement belle, mais vertueuse en tout point, et qui s'est faite l'ennemie des compromissions (Cate Blanchett). Admirés de tous, ils ont la lourde tâche d'incarner la perfection dans une société qui en est bien loin, et où règnent les commérages et la chasse au mari la plus éhontée, car nous sommes en pleine "saison" londonnienne. C'est alors que surgit l'intrigante et séductrice Madame Cheveley(Julianne Moore), vraie Milady victorienne, qui menace de révéler un secret du passé de Sir Chiltern, si ce dernier ne fait pas mine d'encourager au Parlement une spéculation boursière des plus douteuses concernant un canal en Argentine, opération sur laquelle Madame Cheveley a investi lourdement. La vie de Lord Chiltern bascule. Il n'a pas toujours été ce modèle de vertu politique et personnelle. Il risque de perdre son épouse, sa carrière, la face... Piégé, il se tourne vers son ami de toujours, Lord Arthur Goring, lequel représente le dandy parfait, mauvais sujet à priori perdu pour le mariage et la respectabilité.
La comédie est légère, les répliques font mouche à tout les coup (les fameuses épigrammes !), mais le fond est grave, puisqu'il s'agit d'un couple qui va être forcé de tomber de son piédestal, du moins dans leur tête à tête. La femme et le mari s'admirent, mais qu'admirent-ils ? Une illusoire perfection? Sont-ils capables d'aller au-delà, de renoncer à cette ivresse d'incarner un modèle social ?
L'enjeu est là. Et pour le dire avec des mots plus modernes : peut-on accepter d'aimer l'autre, une fois qu'on a dépassé le stade de la cristallisation stendhalienne des débuts (qui parait l'élu(e) de toutes les qualités), ou une fois que s'effondre le malentendu qui fut à l'origine de son amour ? Voilà un sujet éternel, d'Oscar Wilde à Sex and the City, rien ne change trop sous le soleil...
Mais comme le dit si bien l'auteur, se servant de la bouche ironique de Lord Goring, son personnage (incarné brillamment par Rupert Everett):

" Tout ce que je sais, c'est qu'il faut du courage pour voir le monde dans toute sa splendeur viciée et continuer à l'aimer. Et encore davantage pour la voir dans l'être qu'on aime, et l'aimer malgré tout."


Toujours dans la famille des "comédies caustiques et romantiques dont le fond pèse plus lourd qu'il n'y paraît", je voudrais finir en beauté, avec la dernière et très réussie (de mon point de vue, qui vaut ce qu'il vaut ! Je ne suis pas membre d'un club Jane Austen, ou d'une société qui défend mordicus cet auteur contre toute adaptation cinématographique) adaptation à l'écran d'Orgueil et Préjugés, le roman le plus célèbre de Jane Austen, par Joe Wright, jeune cinéaste qui a réalisé un film à la fois très sobre, moderne et fidèle à l'esprit de Jane Austen. Les acteurs sont parfaits, Keira Knightley en tête dans le rôle d'Elisabeth Bennet, une jeune femme qui possède trop d'esprit, de fierté et de caractère pour la société de son temps et surtout pour sa situation dans cette société (seconde d'une famille de cinq filles, désargentées, c'est à dire à l'avenir plus qu'incertain). Mais aussi Brenda Blethyn et Donald Sutherland dans le rôle de ses parents, un couple improbable, affectueux, comique, mais dont on se demande s'ils méritent leurs deux filles aînées. (Pour les suivantes, c'est autre chose : deux sont de petites grues minaudantes et sans cervelles, la dernière semble née pour la mélancolie). Pour ceux et celles qui ne connaîtraient pas encore cette histoire, courez louer ce film ! Vous y découvrirez que Jane Austen, fille de pasteur qui écrivit ses romans à un âge très tendre pour nos yeux d'aujourd'hui (une vingtaine d'années, pour les meilleurs), avait une audace inouïe, et savait aussi bien se battre à fleurets mouchetés que le dandy londonien Oscar Wilde, ou le grand satiriste William Makepeace Thackeray. Ses répliques sont assassines et réjouissantes. Mais ce film est aussi une belle histoire d'amour contrariée comme on les aime, une intrigue très maîtrisée où l'on croise de belles princesses timides obligées de vivre chichement par les hasards de la fortune, des ladies tyranniques et horriblement mal élevées, des jeunes gens ombrageux et pleins de préjugés mais qui n'hésitent pas à ouvrir leur cœur avec une franchise désarmante quand la situation exige ce courage (oui, ce courage ! Je pèse mes mots), des tristes sires ridicules et serviles, mais aussi des jeunes filles pauvres et résignées qui ne peuvent se permettre un mariage d'amour : ainsi, Charlotte Luckas, personnage déchirant, qui en cinq minutes à peine résume la cruelle situation des jeunes filles désargentées en un siècle victorien ou l'argent fait sinon le bonheur, du moins la position.
Enfin, sachez que j'ai testé ce film sur les hommes qui m'entourent, que ces derniers étaient "pleins de préjugés" envers ce "film de filles" (des préjugés, voilà qui n'aurait pas déplu à la piquante Jane Austen), et qu'à la fin de la projection ils étaient conquis À L'UNANIMITÉ. Donc tenez bon, mesdames, bataillez ferme, ce film s'adresse à tout le genre humain. Et quel homme ne fondrait pas devant la farouche Elisabeth Bennet, quand elle est si finement jouée par la belle Keyra Knightley ? Et quelle femme ne serait touchée au cœur par un homme qui, toute fierté ravalée, marche vers elle à travers la campagne dans le brouillard irréel de l'aube ?


Si, après tout ça, vous continuez à penser que l'époque victorienne est ennuyeuse, j'abandonne. Enfin... peut-être. Je suis têtue, c'est une donnée dont il faut mesurer l'importance.

Sur ce, bonne soirée à vous tous, et je vous souhaite de belles heures et quelques fou-rires de qualité en compagnie de tous ces beaux esprits !

Gaëlle

43 commentaires:

Anonyme a dit…

chère gaelle ce billet est "delicieusement victorien"!!
Et crois moi dans ma bouche c'est un véritable compliment. Comme toi j'apprecie énormément saki et je suis bien d'accord l'adaptation d'orgueil et préjugé est tout a fait sympathique!!

Holly Golightly a dit…

J'ai ADORE ce billet qui m'a fait rire en prime !!!!
C'est magnifiquement dit, Gaëlle.
Comme toujours. Je n'aurais jamais pensé que quelqu'un puisse avoir autant de dévotion pour l'époque victorienne, qui est mon univers préféré, avant de te connaître.
Figure-toi qu'une de mes lectrices n'était pas très heureuse des éloges que j'avais fais au sujet de l'adaptation du roman d'Austen ! Je suis heureuse que le film t'ait plu également. Mais il est vrai que la version de la BBC est meilleure.
Bonheur aussi de t'entendre parler de Kipling, que j'aime beaucoup aussi. Je suis attachée à lui.
Ton billet me rend heureuse, tout simplement.
Merci.

Gaëlle a dit…

Merci Mélanie ! C'est un vrai bonheur pour moi que mon petit billet ait plu à une grande amatrice de Saki et de Jane Austen ! Reviens quand tu veux, surtout !

Ma chère Holly, j'espérais bien que tu finirais par te rendre compte que j'avais un faible pour l'époque victorienne... je blague ! "Magnifiquement dit", tu exagères... mais c'est très gentil, évidemment. Heureusement que personne ne peut me voir rougir pour ces compliments immérités.Je n'aurai jamais de webcam ! Quant à ta lectrice... c'est pour ça que j'ai précisé que je n'adhérais à aucun club spécialiste de Jane Austen, et parlais en simple néophyte ! La version de la BBC est sûrement meilleure, mais... elle est vendue sans sous titres français ! Ce qui avantage l'adaptation dont je parle... hé hé... et puis vraiment je l'ai vue au cinéma et revue en dvd avec le même bonheur. Maintenant, Elisabeth Bennet aura toujours pour moi le visage grave et rêveur de Keira Knightley, assise près d'un vieil arbre au tronc si épais qu'il semble avoir été planté là du temps de Frodo Baggins...

Holly Golightly a dit…

Tiens, c'est toi maintenant qui refuse que l'on loue ton travail !
:-))))

Holly Golightly a dit…

refuses, pardon.

Anonyme a dit…

Quel billet passionnant, il me donne envie de découvrir Saki, son chat qui parle m'a alléchée :

— Les chats disposent de neuf vies, tu sais, dit Sir Wilfrid avec entrain.

— Peut-être, rétorqua Tobermory, mais ils n'ont qu'un foie.

Excellent ! :-)

Je suis une grande admiratrice de Jane Austen mais les adaptations cinématographiques, même de grande qualité comme cela semble être le cas ici, me semblent toujours inférieure au cinéma que je m'étais fait !

Anonyme a dit…

Je ne connaissais pas du tout Saki mais ton billet (vraiment intéressant en passant!) me donne envie de le découvrir! Merci! :)

Gaëlle a dit…

A Holly : ne commence pas à t'excuser de tes fautes, j'en ai fait des ENORMES dans mes derniers commentaires sur le site de Caroll !! Quant à refuser les compliments.... voyons voir... si me mets à faire ça, est-ce que toi tu accepteras les tiens, dans un genre de vases communicants ? Avoue que ça pourrait être drôle. Et profitable. Il faut qu'on y réfléchisse.

A Samantdi : Ravie de t'avoir alléchée avec Saki ! Tu ne seras pas déçue. C'est hilarant. On peut même le trouver en V.O sur un lien que j'ai mis (le projet Gutenberg) car toute son œuvre est passée dans le domaine public... mais comme je ne suis pas bilingue je le lis en français !
Quant à Jane Austen : je comprends parfaitement qu'une lectrice fervente ait du mal avec toute adaptation cinématographique qui prétend s'attaquer à son imaginaire... je hurle si on me force à regarder une adaptation de "Jane Eyre", mon livre fétiche de toujours ! Pour Jane Austen, ça m'embête moins. Sauf si c'est mauvais, bien sûr...

Anonyme a dit…

Je confesse mon ignorance totale des écrivains et de l'époque victorienne. Les écrivains de cette époque sont associés dans mon esprit à une impertinence et une légèreté d'esprit face aux cruautés de la vie et une rebellion contre les conventions de la société.
Les billets que tu as écrit sur les écrivains de l'époque victorienne n'a fait qu'attiser mon envie de kidnapper leurs livres et de les lire jusqu'à plus soif !
Malheureusement, ma liste de livres à lire est déjà longue et je ne sais pas où trouver le temps à consacrer à ces futures lectures...

Gaëlle a dit…

Bonsoir Allie ! Excuse-moi, je ne t'avais pas vue ! Merci infiniment pour le compliment, et je suis ravie d'avoir pu te faire découvrir un auteur, à toi qui en connais tant et m'en fais souvent découvrir des nouveaux. Bises !

Gaëlle a dit…

Bonsoir et bienvenue, Sirekrabo ! Je pense que les traits que tu associes aux écrivains victoriens sont plutôt bien vus... même si la légèreté n'était pas si légère, ni un parti si facile à adopter : beaucoup furent châtiés pour trop d'irrévérence, ou trop de liberté d'esprit. Oscar Wilde le premier... Mais c'est vrai qu'il règne incontestablement un esprit de rebellion chez ces romanciers, parfois même à leur insu. Est-ce que Jane Austen était totalement consciente des bombes qui éclataient dans le savant millefeuille de ses phrases raffinées ? Il faudrait pouvoir pénétrer dans son cerveau pour le dire... Enfin, je connais le problème de la longue liste de livres à lire, et je te répondrai : ce n'est que partie remise ! Il y a toujours un rendez-vous possible, quelque part, à un moment donné, avec un écrivain dont on a eu, un jour, envie de croiser la route. J'ai ainsi des rendez-vous programmés dans l'avenir avec de nombreux auteurs, et je m'en réjouis...

Holly Golightly a dit…

Précisons tout de même que Jane Austen n'est pas une victorienne, même si elle manque de peu d'être incluse dans la période.

Gaëlle : je vais réfléchir à cette histoire de vases. :-)
Sinon, de Kipling, as-tu La lumière qui s'éteint ? Très beau livre.

Gaëlle a dit…
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Gaëlle a dit…

Tu as parfaitement raison au sujet d' Austen, Holly. Mais j'emploie "période victorienne" dans le sens large de beaucoup d' historiens, comme Peter Gay, qui définit ainsi le terme victorien, dans un ouvrage passionnant, "Une culture bourgeoise, 1915-1914" : "L'usage traditionnel le confine aux goûts, à la moralité et aux mœurs britanniques, et même, plus étroitement, anglais. Il n'a jamais été limité au règne de la reine Victoria, puisque l'on estime en général qu'il y a des victoriens avant son couronnement en 1837 et après sa mort en 1901. Autrement dit, ce vocable s'applique au XIXème siècle, compris entre le défaite ultime de Napoléon en 1815 et le début de la première guerre mondiale en 1914." Peter Gay parle ainsi d'une communauté de valeurs et de préoccupations, au-delà des règnes des monarques successifs. Et va jusqu'à dire qu'il y a des victoriens en dehors du Royaume Uni, sans prétendre qu'ils sont identiques à leurs contemporains anglais naturellement! Bref. Je sais que ta définition est plus étroite et que tu distingues précisément, par exemple, la période victorienne de la période édouardienne. Mais j'avoue que j'aime assez la définition généreuse de Peter Gay, qui n'exclue pas forcément la tienne du reste ! Cela dit... j'ai glissé Daniel Defoe dans la liste par pure mauvaise foi, aucune définition du mot victorien ne pourrait l'inclure puisqu'il appartient au siècle précédent...mais je l'aime beaucoup, aussi ai-je un peu triché... J'ai même failli rajouter Swift. Je me suis arrêtée de justesse !

Sinon oui, les vases pourraient être une idée intéressante, nous concernant. Au moins par intermittence. Chacune notre tour nous refuserions tout compliment...
A part ça, je n'ai pas lu ce livre de Kipling mais le titre me séduit déjà et voilà un rendez-vous de plus inscrit dans mon futur littéraire.

Holly Golightly a dit…

J'ai d'ailleurs acheté le livre de Gay, puisque tu m'en avais parlé dans un courrier. Je note tout ce que tu me recommandes. Je te donnerai des nouvelles de ma lecture prochainement.
Oui, j'aime bien avoir des dates serrées, cela me facilite la vie, puisque j'aime beaucoup classer et étiqueter. Ton approche est plus juste et conforme à la réalité que la mienne, puisqu'il est absurde d'enserrer dans des types le flux même de l'existence.

Gaëlle a dit…

Non non, mon approche n'est pas plus juste que la tienne, elle est simplement conforme à mon côté "plus on est de fous plus on rit". Pour avoir ta précision, que j'admire, il faut avoir la culture qui l'accompagne... la mienne a trop de trous ! Quant à emprisonner d'une quelconque manière le flux de l'existence, c'est un délit que je ne t'ai jamais vue commettre... bien au contraire.

Anonyme a dit…

Bonjour,

Victoriens ou non, ce sont les écrivains anglais qui me plaisent le plus. En v.O, je te remercie donc du lien vers Gutemberg que j'avais perdu... Voilà, Saki est téléhchargé et venu se mettre dans la file de livres à lire..
merci de me l'avoir fait découvrir.
à mon tour : Bill Bryson (je crois américain longtemps exilé en UK) décrit de manière désopilante la société UK "notes from a small island" en regard avec "notes on a big country". Un humour on ne peut plus british. et un oeil acéré sur les choses qui l'entourent... (et une femme complaisante car il entreprend de ces périples...). Je pense que tu peux les trouver en français.
amicalement

Anonyme a dit…

Hiiii, tu m'a donné envie de tout lire Saki (j'avoue ne pas connaitre cet auteur victorien, si ce n'est de nom, contrairement à beaucoup d'autres cités dont je me délecte à chaque fois).

Quant à la version cinématographique d'Orgueil et préjugés, je l'ai vu au moins 4 ou 5 fois tellement j'ai adoré (oui, j'avoue, peu d'acteur me touche mais celui qui joue Darcy m'a fait fondre, coincé comme pas 2 mais avec un regard à vous faire tomber en pamoison... t'inquiète, mon amoureux m'a pas fait de scène quand je le lui ai dit ;p). De plus, Keyra Knightley joue une Elisabeth absolument adorable ainsi que celle qui joue sa soeur aînée...

Pleins de bonnes choses à découvrir encore cette fois-ci. Merci :)

PS: As-tu reçu mon dernier mail envoyé... heu... il ya une semaine au moins?

Anonyme a dit…

Bonjour Gaëlle,

bon, Saki, c'est noté; Wilde, j'adore (autant d'esprit, de raffinement et de talent en un seul homme, et il a fallu qu'il finisse en prison, c'est fou); quand à Jane Austen, c'est toujours un délice à déguster lentement, et il y a peu d'auteurs que l'on a envie de lire comme ça, en prenant le temps. Personnellement (mais je ne m'appuie sur rien pour dire cela), je pense qu'elle était parfaitement consciente des conséquences de ses écrits, le regard qu'elle pose sur la société et les moeurs de l'époque est beaucoup trop acéré, et son propos précis pour que ce soit innocent...
Je n'ai pas vu Orgeuil et Préjugés, mais j'avais été subjuguée par la beauté de Raison et sentiments, par Ang Lee.

Sinon quand tu parles du malheur de Dickens et Kipling, ça m'amuse car j'ai commencé à lire Vipère au poing hier et je suis collée au mur par chaque phrase, tant c'est bien écrit. C'est à te faire honte de poser tes mains sur un clavier...

Mais que ceci ne nous arrète pas, bien au contraire, merci beaucoup de tes écrits qui sont un régal et que je guette, et à très vite

Gaëlle a dit…

A Alanis : bonjour et bienvenue ! Merci pour ton commentaire et pour ton conseil littéraire, je ne connais pas cet auteur mais je suis ravie, il a tout pour me plaire, je le sens. A part ça, encore une qui lit en anglais... que je vous envie, vous tous qui avez eu le courage de dépasser le cap du découragement et pouvez savourer dans le texte le style de ces auteurs...il va vraiment falloir que je m'y mette, autrement que par fragments...Bonne lecture avec Saki, et merci de ton passage !


A Doune : merci pour tout ton commentaire... je vois qu'on partage le même enthousiasme pour les héros de l'adaptation d'Austen... ah, quel Darcy désarmant ! Et je suis bien d'accord, Keira Knightley est une merveilleuse Elisabeth Bennet.
PS : j'ai bien reçu ton mail mais je n'ai pas encore eu le temps de répondre à mon courrier ! Tu n'es pas la seule victime. Désolée, je te réponds très vite.

Gaëlle a dit…
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Gaëlle a dit…

Le café littéraire de Gaëlle

Gaëlle a dit…

Bonsoir May ! Oui, je suis comme toi, maintenant je ne peux plus lire ou entendre les tirades brillantes d' Oscar Wilde sans un pincement au cœur quand je pense à son destin. Quant à Jane Austen : elle était sûrement consciente au moins de son irrévérence, et en tirait sûrement plaisir ! Mais les écrivains parfois ne sont pas conscients du degré de subversion de leurs textes : c'est le cas de Charlotte Brontë, par exemple. Pour Austen, je ne suis pas spécialiste du tout, juste amatrice, alors... je ne me prononcerai pas. Je suis juste admirative devant l'audace de cette jeune fille, et sa profonde compréhension des mentalités de son époque.
Sinon, le passage de Graham Greene sur Saki et Kipling m'avait fait penser aussi à "Vipère au poing" ! C'est à se demander si une enfance traumatisante n'est pas un bon préambule pour transformer en cygne littéraire un "vilain petit canard". Cela dit, il y a des myriades d'enfants maltraités, et bien peu deviennent Dickens, Saki ou Kipling... malheureusement. Bises, May, et merci de ta fidélité. Je guette tes commentaires aussi ! D'ailleurs je le répète souvent, mais vos commentaires à tous et à toutes sont de vraies contributions qui m'interrogent, me font découvrir de nouveaux auteurs, nourrissent ma petite réflexion, et je vous lis toujours avec bonheur.

Anonyme a dit…

Les enfances traumatisantes de Kipling, de Dickens, de Saki et de tant d'autres me font penser au billet de Holly du 31 août dernier, la citation de Gilles Deleuze. Comme tu dis, ils n'étaient pas les seuls à avoir une enfance traumatisante mais eux ont choisi de l'exorciser par l'écriture. D'autres choisissent la peinture, le dessin, le chant, la musique, le théâtre, etc. Pourquoi Kipling, Dickens ont-ils choisi l'écriture ? Il faudra entrer dans leur tête pour le savoir... Ou lire leurs livres :)

Gaëlle a dit…

Bonjour Sirekrabo ! Oui, le billet d'Holly sur cette citation de Deleuze (superbe citation !) répond parfaitement aux mots de Greene. Pourquoi Kipling, Dickens, ont-ils choisi l'écriture ? Je ne sais pas plus que toi, mais parfois on n'a pas le choix des moyens pour exorciser sa souffrance. J'admire les musiciens et les peintres autant que les écrivains. Je crois que lorsque, comme Dickens, on possède un tel talent, voire du génie (même si ce mot est devenu galvaudé), ce talent décide pour vous. On ne peut pas lui résister sous peine de s'anéantir, tout simplement. De vivre une non-vie. Merci beaucoup du commentaire, c'est une question très intéressante... et bonne journée !

hors landau a dit…

MAis où sommes-nous? Que s'est-il passé depuis mon enfance? Saki faisait partie des classiques, aussi "incontournable que le Swift des "instructions aux domestiques", de la "modeste proposition", que Wodehouse ou Evelyn Vaughn... O passait des aventures de William de Richmal Crompton (à lire absolument) à Saki sans problème! C'étaient nos point d'ancrages british comme alphonse allais en France, CAmi,Auriol: des humours différents mais une attitude devant la vie, une certaine façon d'être soi qui tient le choc devant l'adversité, une dignité, une morale.

Proust est un accompagnateur: ça se lit à petites doses, tute sa vie, comme l'Ulysse de Joyce, impossibkle à lire d'u seul coup.On pred,,on reprend, on laisse, on oublie, on ne siat pous ce qu'on a lu comme chapitre ou pas... On revient, on aime ça, on n'aime plus, on s'en fout.. Et puis tiens, on va revoir quand même...

Ishiguro vaut le détour... Un wodehouse inversé, implacable, car, comme son nom l'indique, il est anglais!

Anonyme a dit…

Bravo pour cet article qui donne vraiment envie d'aller piocher parmis les auteurs victoriens pour nos prochaine lecture... Ta passion semble contagieuse et c'est tant mieux.

Gaëlle a dit…
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Gaëlle a dit…

Bonjour Loupiote ! Décidément c'est un plaisir de rencontrer une nouvelle venue. Je viens de jeter un rapide coup d'œil chez toi, je sens que je vais devoir rafraîchir mes liens... Il y a des lectures qui me mettent en appétit et d'autres que nous partageons déjà (ex : "L'homme qui voulait vivre sa vie", et Fred Vargas, bien sûr...) Merci de ta visite, de ton gentil commentaire, et à bientôt, chez l'une ou l'autre.

Gaëlle a dit…

Gaëlle a dit…

Orlando, je vous avais longuement répondu mais la machine a mangé mon message...sans doute avait-elle faim ? Bref. Je vous disais que vous aviez eu beaucoup de chance de pouvoir découvrir Saki,Wodehouse ou Evelyn Vaughn dans votre enfance, sans parler de Swift dont j'adore les "instructions aux domestiques"... les temps ont bien changé hélas pour nous! Je me serais moins ennuyée en lisant Saki qu'en endurant "Eugénie Grandet", qui (heureusement pour moi) ne m'a pas détournée de Balzac avant que je ne découvre des merveilles comme "la peau de chagrin", "Splendeurs et misères des courtisanes", etc, etc ! Mais aurait pu, infligé en quatrième...

Je retiens tous vos précieux conseils littéraires, en particulier Richmal Crompton que je ne connais pas. Ishiguro, j'aime beaucoup, et je suis entièrement d'accord avec vous sur Proust. Vous en parlez à merveille. Le lire à petites bouchées est un éblouissement.
Grand merci de votre visite, et de ce commentaire fourni et érudit !

Anonyme a dit…

Bonjour..ou plutôt Hello! Superbe billet! J'ai découvert ton blog par l'intermédiaire de celui de Laurence... et je ne regrette pas d'avoir cliqué. Je suis moi aussi une fan d'Austen que je trouve caustique à souhait. Je suis moi familière de Wilde. Enfin, Saki fais désormais partie de ma liste de livres à lire (qui ne risque pas de diminuer maintenant que j'ai découvert ton blog!). Pour ce qui est des adaptations d'ouvrages au cinéma, j'ai toujours été assez mitigée. c'est pour ça que je ne suis pas allée voir Orgueil et préjugés...peur d'etre déçue tant le livre m'a complètement emballée...Encore bravo pour ce billet "réhabilitant" ;-)!

Gaëlle a dit…

Bonjour Choupynette ! Encore une nouvelle rencontre...et une fan d'Austen et de Wilde ! Pour ce qui est du film, comme je le disais plus haut, quand on est une vraie inconditionnelle d'un film, c'est très rare qu'on ne soit pas déçue par une adaptation. Il paraît que les meilleures adaptations sont celles qui trahissent le plus l'œuvre initiale, car si c'est pour l'adapter platement, quel intérêt ? Moi, disons que cela dépend de mon degré d'attachement affectif à un livre : Jane Eyre : pas touche ! Par contre, pour beaucoup d'autres, au risque d'être déçue, j'y vais en essayant de n'y voir qu'une interprétation personnelle qui me séduira ou non. Mais ce qui est sûr, c'est que réussie ou non, une adaptation vient toujours heurter les silhouettes imaginaires qui étaient nées à la lecture... et ça c'est toujours pénible. Merci d'être passée par là et d'avoir laissé un message sympathique !

Anonyme a dit…

Mais non, on ne peut PAS avoir une vision tronquée de l'époque victorienne, tu nous en parles tellement, et sous des jours si différents...
Aujourd'hui donc, l'humour de Saki: je suis vraiment désolée de te lire un dimanche, j'aurais voulu courir dans une librairie et connaître la suite, savoir ce qu'a vu et entendu ce chat, rire penser à Hitchcock, revoir Hitchcock, relire Saki, et revenir pour converser avec toi des joies du "victorianisme" (ça se dit?)
Ayant suivi tes conseils et lu "dans les coulisses du musée" et "souris bleue", je dois te dire que j'ai adoré, les descriptions si fines, si drôles, l'observation si juste du monde, des gens, la construction compliquée mais tellement plus excitante!
Désolée de venir polluer vos discussions sur le "pour ou contre Jane Austen adpaté" (à ce propos je ne peux rien dire, je n'ai vu que l'ancienne version de Pride and Prejudice, que j'ai adorée, dans le cadre d'un cours à la fac où on étudiait J. A dans le texte, un pur bonheur...)mais quand on ne connaît pas, on se tait.
A très vite alors, quand j'aurai acheté Saki!

Gaëlle a dit…

Marianne tu es trop gentille ! Je suis enchantée que ta lecture dominicale ait engendré un suspense qui ne sera calmé qu'en librairie... oui Atkinson est régalante, et sait, comme peu de romanciers, mélanger l'humour (voire le burlesque) et le déchirant avec une harmonie parfaite et très humaine.
Reviens quand tu veux, avec ou sans livres, et si tu as des découvertes personnelles à proposer, n'hésite pas ! (Ce conseil vaut pour tous les visiteurs de ce blog, bien sûr...)

Anonyme a dit…

je me réservais une petite soirée tranquille pour me régaler avec ton billet que j'avais survolé en fin de semaine.. et bien je n'ai encore pas été déçue. Je finis même par me demander si je ne préfère découvrir ces livres par le biais de ta plume plutôt que de me ruer à les lire. Non surtout, ne fais pas de billet plus court, parcque quand je commence à lire, dès les premières lignes je sais que quand j'arrive à la fin, je suis déjà en attente du prochain, pour le plaisir que ça me procure.
Cela dit.. je vais quand même de ce pas ajouter quelques titre à me liste d'envies de lire.. Bonne soirée.

Anonyme a dit…

J'attendais d'avoir un moment peinard pour déguster ton billet, j'avais bien fait! Ton enthousiasme est tellement communicatif que j'inscrit le nom de Saki sur ma liste... Bizarrement, je n'ai jamais entendu parler de cet auteur, alors que j'ai fait des études de littérature anglaise (et américaine)! Par contre, je connais tous ses camarades, et comme je les apprécie, j'imagine que je peux attendre le plus grand bien de ce Saki...

marie.l a dit…

ma toute petite culture littéraire serait plutôt germanique (bien sûr j'ai lu Dickens ou les soeurs Brontë, surtout Greene et quelques autres mais quand même...) je découvre grâce à Holly et à toi-même tant de nouveautés qu'il va falloir que je me dépêche pour arriver à ce que je souhaite maintenant... Je suis déjà bien contente de lire tes billets qui m'y aident. Merci Gaëlle

Gaëlle a dit…

Ah, Nziem, si en plus tu me pousses dans le sens de mon défaut naturel... on ne va plus s'en sortir ! Merci de tes compliments, mais lire les livres, c'est quand même beaucoup mieux que ma petite prose, hé hé ! Cela dit, je vois bien que vous croulez sous les prescriptions littéraires... c'est pourquoi le prochain billet, qui arrive, qui est déjà en chemin, parlera de DVDs ! Grosses bises, et désolée pour mon courrier mail qui pâtit un peu en ce moment, mais je suis débordée. Promis, je t'écris dès que j'ai 5 min!

Bonjour Lisa ! Tu as fait des études de littérature anglaise et américaine ? Ah la veinarde... Voilà l'orientation que j'aurais dû choisir en fac. Dommage, il est juste 15 ans trop tard... enfin, quelles études as-tu faites exactement, si ce n'est pas indiscret ? Ça m'intéresse ! Merci de ton gentil commentaire...

Merci à toi Mariel de me faire le plaisir de me rendre visite...Justement je suis nulle, pour ce qui est de la culture germanique (et ça m'embête !), alors si tu veux on peut faire des échanges culturels : un peu de littérature anglophone contre quelques titres de bons romans allemands ou autrichiens, ceux que tu préfères : tu es d'accord ? Je serais ravie de pouvoir ouvrir mes horizons grâce à toi ! Très bonne journée.

Anonyme a dit…

To be precise, j'ai suivi un cursus LLCE (langue, littérature et civilisation étrangère) en anglais, donc cela comprend anglais et américain. Après un DEUG normal, j'ai fait une licence option documentation, une maîtrise orientée sur la littérature du 20e siècle (et mon mémoire sur la traduction des whodunits médiévaux) et pour terminer un DESS de (attention les yeux): traduction et traductologie de l'écrit pour le marché du livre. Voili voilà. C'est joli sur le papier, mais je n'ai jamais trouvé de boulot là-dedans! Mais au moins cela m'a donné le goût de la lecture en VO...

Gaëlle a dit…
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Gaëlle a dit…

Gaëlle a dit…

To ne specific, Lisa, I'm IMPRESSED ! Ton cursus est aussi brillant qu'interessant! Et le problème de ne pas trouver de boulot à la hauteur, ENSUITE, voilà un mal bien de chez nous et qui me scandalise... mais c'est une autre histoire ! Bonne journée, Lisa, et merci de ces précisions. Ma curiosité est enchantée.

Gaëlle a dit…

A Lisa : je voulais écrire : To be ! "To ne or not to ne", tout de suite, on voit que je ne suis pas bilingue... jusque dans mes coquilles !

Anonyme a dit…

J'ai lu avec intérêt vos réflexions. Je n'ai pas lu Saki, mais je me promets de le faire. Pour ma part, j'adore Wodehouse et son "petit-fils" insolent, Tom Sharpe. Dans la littérature britannique, ma tendresse va à Thomas Hardy, Kipling, Dickens (original, isn't it?), Conrad. J'ai découvert il y a quelques années John Harvey et ses polars (quel écrivain!). C'est après avoir vu et beaucoup aimé le film ( malgré le trop pâlichon Darcy de Matthew MacFadyen) que j'ai enfin lu le roman "Orgueil et préjugés" avec grand bonheur. L'adaptation d'Emma Thompson pour "Sense and sensibility" d'Ang Lee est excellente et le film très réussi également.

Bridget a dit…

Merci et bravo pour ce billet qui m'enchante...5 ans après sa publication! Je cherchais des détails sur Saki et de fil en aiguille me voici ici!
A bientôt!